Verlaine et Rimbaud chantés par Léo Ferré par Sarah Eissner

Bon, c'est décidé, je me lance dans la critique de cet album. Souhaitez-moi bonne chance.


Tout d'abord, il convient de présenter les différents poètes, brièvement, afin de mieux cerner ce qui les rapproche.
Verlaine, l'éternel incompris, le talentueux mais trop sensible poète, Rimbaud, l'adolescent trop mature, trop doué, précoce et éphémère et Léo Ferré, l'inégalable interprète, défenseur des petites gens et amoureux des mots.

L'oeuvre de Rimbaud est fulgurante, elle tient en peu de pages et pourtant elle a à jamais bouleversée notre littérature. Elle est tout d'abord influencée d'autres poètes puis peu à peu il trouve son originalité, elle se trouve notamment dans Le Buffet. Rimbaud joue avec les images et les couleurs, ses mots les appellent et elles nous éclatent au regard. Il joue avec nos sens, il n'a cure de la forme si chère aux romantiques. Qu'importe la rime ! Le poète n'a pas besoin du vers pour poétiser.

Verlaine, lui, si vous me permettez de ne développer que les théories de la dernière "période" de son oeuvre, défend, dans l'Art Poétique notamment, la musicalité. De la musique avant toute chose ! Et pour cela préfère l'impair. En effet, Verlaine lui trouve plus de rythme, plus de musicalité, l'exemple de la Chanson d'automne est flagrant. Il "milite", si je puis dire, pour un vers plus libre, bien qu'il reste attaché à une certaine forme, dépouillé du lyrisme d'un Musset ou d'un Lamartine. Il préfère suggérer, nuancer, faire sentir l'inexprimable par un jeu savant de transpositions cachées sous une apparente naïveté du poète. Pour cela, il préfère les allitérations et les assonances à la rime. Bien que celle ci soit nécessaire, elle ne doit pas être abusive. En résumé, Verlaine c'est le dépouillement, le gris, la nuance, la musique, la sensation.

Et Léo Ferré dans tout ça ? Léo Ferré, c'est un amoureux de la langue, des mots, des idées, de la poésie. Au sens large, au sens vrai, celui qui parle du poète. De celui qui sent les mots, qui joue avec eux, qui est sensible et pas seulement du technicien. Dans une chanson, Préface dans l'album Il n'y a rien, il évoque le "vrai" poète opposé au dactylographe qui compte ses pieds, qui s'interdit les "mauvais" mots, trop populaires, trop spécialisés, sous prétexte qu'il ne sait pas les faire sonner. Toujours, dans cette même chanson, manifeste du poète qu'est Léo Ferré, il clame que la poésie doit être vivante lue, chantée, qu'elle est musique. C'est donc tout naturellement, partageant les points de vus de Rimbaud et Verlaine, qu'il a mis en musique et interprété la poésie de ces deux génies. Enfin quand je dis qu'il a "mis en musique", je veux dire il a mis en lumière la musique de ces poèmes par son interprétation, prégnante, magnifique et des instrumentalisations qui portent subtilement les mots et leur confèrent toute leur force et leur beauté.


J'espère avoir été clair. Je peux répondre aux questions si besoin. Enfin, pour finir, personnellement, j'adore Le Buffet, ce poème est un des plus beaux, et la manière dont Ferré le chante me donne à chaque fois des frissons.
SarahEissner
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 15 nov. 2014

Critique lue 1.1K fois

2 j'aime

Sarah Eissner

Écrit par

Critique lue 1.1K fois

2

D'autres avis sur Verlaine et Rimbaud chantés par Léo Ferré

Verlaine et Rimbaud chantés par Léo Ferré
SarahEissner
8

Critique de Verlaine et Rimbaud chantés par Léo Ferré par Sarah Eissner

Bon, c'est décidé, je me lance dans la critique de cet album. Souhaitez-moi bonne chance. Tout d'abord, il convient de présenter les différents poètes, brièvement, afin de mieux cerner ce qui les...

le 15 nov. 2014

2 j'aime

Du même critique

Anastasia
SarahEissner
10

C'est toujours le même refrain : les barbus crient et les chauves sourient.

Avant de commencer la rédaction de cette critique, j'ai lancé l'OST d'Anastasia. Je suis donc actuellement en train de chanter et de me trémousser sur mon canapé. Convenons que ce n'est peut-être par...

le 12 nov. 2014

17 j'aime

2

Staline, le tyran rouge
SarahEissner
1

L'histoire une science ? Amateurs !

Aucune objectivité, aucune réelle source scientifique, aucun appel aux historiens spécialistes de cette période de l'histoire. Ce "documentaire" a été par ailleurs fortement décrié par les...

le 24 févr. 2014

15 j'aime

13

Ma 6-T va crack-er
SarahEissner
7

1996-2014 : Même combat !

Ma 6-t va crack-er n'est pas un grand film. Si vous espérez la plus belle des photographies, la plus parfaite des réalisations, si vous cherchez un esthétisme quelconque, je ne peux que vous...

le 4 août 2014

11 j'aime

2