Orchestral manoeuvres in the dark
Zola Jesus serait-elle déjà en panne d’inspiration ? Après le passable "Conatus", la revoilà deux ans plus tard avec un album qui sent déjà bon le vieux. Celui-ci propose en effet une relecture de quelques titres de "Stridulum II" et "Conatus"… Oui mais pas n’importe comment : ce sont des reprises orchestrales, messieurs dames ! On le sait, l’artiste a toujours entretenu des liens très étroits avec l’opéra et la musique classique, et on aurait dû se douter que cela reviendrait la hanter à un moment ou à un autre... Ca déconne plus, quoi.
Ce qui n’était à la base qu’une expérience live pour le Musée Guggenheim s’est donc transformé en un disque qui, malgré son contenu, vous fera découvrir une nouvelle Zola Jesus… Et vous l’aurez deviné, cette métamorphose kafkaïenne inversée ne m’a pas convaincu. Principalement axé autour de la voix de la chanteuse et du quatuor à cordes qui l’accompagne, "Versions" édulcore en effet la plupart des morceaux de leurs sonorités electro et de leur noirceur d’origine, et je dois dire que je suis bien embêté, car il me semble que malgré les violons et les contrebasses, cela n’a été profitable à aucun d’entre eux. Je veux dire par là que ces nobles réinterprétations ne dépasseront ou n’égaleront même jamais les titres originaux, si bien que l’on en arrive rapidement à se demander quelle est l’utilité d’une telle démarche. Le pire exemple de ratage, vous le subirez d’emblée : "Avalanche (slow)" est effectivement lente… Lente… Trèèèès lente ! Et trop minimaliste surtout ! Juste la voix et les cordes, même pas une batterie pour donner un peu de rythme à ce somnifère musical qui fait immédiatement craindre un disque léthargique. Même conclusion pour "Hikikomori" qui se fait hara-kiri ou "Run me out" qui, en versant dans une sorte de mélancolie apathique induite par la réorchestration, perd en puissance et en émotion, devenant assez anecdotique.
Si la première moitié de l’album se révèle donc catastrophique, il faut bien avouer que la seconde, "Collapse" exceptée, est d’un niveau largement supérieur. L’enchaînement "Seekir" / "Sea talk" / "Night" / "In your nature" est agréable, et c’en est même surprenant… Oui, mais ne serait-ce pas parce que ce sont les chansons dont l’orchestration se rapproche le plus des versions originales ? Les martèlements de batterie et les plages electro y font justement leur come-back, ce qui provoque chez l’auditeur un soudain regain d’intérêt, lui qui depuis quelques minutes avait tendance à somnoler. Cette impression positive ne suffira pourtant pas à faire de "Versions" un disque excitant, et c'est avec regret qu'on le rangera finalement dans la catégories des fausses bonnes idées. Tout en se demandant si l'avenir musical de la nouvelle prêtresse du rock gothique ne serait pas en train de prendre l'eau.