Wired
7.5
Wired

Album de Jeff Beck (1976)

Pas évident de succéder à l’immense « Blow by blow » de 1975 pour lequel Beck avait fait appel à George Martin à la production et son pote Stevie Wonder pour 2 compositions et aux claviers sur un morceau. Album au succès phénoménal mais qui avait désarçonné les fans de la 1ère heure du Maestro Beck qui ne voyaient en lui qu’un guitariste d’un seul genre, le blues rock voire heavy rock et c’est tout. Seulement voilà, Beck était un musicien libre qui n’allait jamais dans la direction où on l’attendait mais là où il le souhaitait et si ça ne plaisait pas, tant pis, il s’en moquait ! George Martin reste à la production mais plus question des cordes somptueuses qu’il avait tissées dans « Blow by blow » pour ce « Wired », ni de Stevie. Une équipe remaniée est donc sur le pont. Pour l’album précédent, Jeff avait été très influencé par la musique du Mahavishnu Orchestra de John McLaughlin. Et voilà que le groupe vient de se séparer. Qu’à cela ne tienne, Beck embauche 2 anciens membres de la formation, le claviériste Jan Hammer et le batteur Norada Michael Walden, ce dernier écrivant en plus la moitié des titres de l’album. Leur rôle va être essentiel dans ce nouvel album. Pour le reste on retrouve le fidèle Max Middleton au piano électrique, Wilbur Bascomb à la basse et sur certains morceaux Richard Bailey à la batterie. A partir de là, l’ambiance ne diffère pas fondamentalement du précédent, on reste même dans la continuité : du blues (car Beck était avant tout un fabuleux bluesman), du jazz, du rock, du funk et tout ça fait un joyeux mélange délectable qui malgré un son un peu daté, s’appuie sur des compositions hyper solides dont plusieurs resteront dans ses setlists pendant longtemps.

L’album est enregistré début 76 entre Londres et Hollywood et si le mélange des genres reste plus que jamais présent, il y tout de même de sacrées différences avec le précédent album : George Martin doit partager la production avec Jan Hammer. Quant à Beck, il n’écrit aucun des morceaux de « Wired ». On le sait, il n’est pas un chanteur ni un immense compositeur (lui-même en convenait avec lucidité). C’est pour cela qu’il reprenait souvent des morceaux d’autres artistes mais en sachant se les approprier à la perfection. Il s’en remet donc à d’autres en particulier à Walden pour cela. Mais il demande aussi à Max Middleton et Wilbur Bascomb de s’y mettre afin de calmer les ardeurs « fusionnesques » des transfuges du Mahavishnu Orchestra. Car avec Hammer, c’est aussi l’arrivée (massive) des synthés moog qui donnent un son franchement daté et qui finissent par devenir un peu trop présent alors que sur « Blow by blow », personne ne venait faire d’ombre à Beck. Bon, « faire de l’ombre » c’est très relatif car le jeu de Jeff reste toujours hyper créatif, bluesy, parfois rageur et ça, personne ne peut y toucher !

Les morceaux, eux, sont peut-être plus directs que ceux de « Blow by blow » (avec le sublime et délicat « Cause we’ve ended as lovers » amené par Stevie). « Led Boots » écrit par Middleton, reste un classique de Jeff Beck, une sorte de démonstration de force dès l’ouverture, histoire que ça claque bien. On a aussi du funk rock avec « Head for Backstage Pass » (on jurerait entendre Stanley Clarke là-dedans !!!). Walden et Hammer se taillent la part du lion avec « Come Dancing », « Blue Wind » ou encore « Sophie ». Mais on a un peu l’impression que Beck est leur invité plutôt que l’inverse, et c’est vraiment ce qui me fait enlever une étoile mais attention, tous ces morceaux sont absolument succulents et s’écoutent encore avec plaisir (même si les synthés peuvent sembler un peu obsolètes 50 ans après). Reste la seule reprise de cet album, le sublime « Goodbye Pork Pie Hat », morceau que Charles Mingus avait écrit en hommage à Lester Young. Beck en donne sa version personnelle et magistrale, à tel point que Mingus lui-même l’a félicité pour cette version et il n’était pas connu pour avoir le compliment facile !!!

Pour moi, un tout petit cran en-dessous de « Blow by blow » mais superbe quand même. La fin sur « Love is green » est magnifique avec le piano joué par Walden et la guitare nostalgique de Beck. Le succès sera de nouveau impressionnant (pour un album purement instrumental), ce qui va conduire à une tournée avec le Jan Hammer Group. Malgré mes (petites) réserves, un des meilleurs Jeff Beck. Aucun titre de cet album n’a été interprété lors de sa dernière tournée avec Johnny Depp en 2022, quelques mois avant sa mort, peut-être un indice que cet album a tout petit peu moins passé l’épreuve du temps que d’autres dans sa discographie.

JOE-ROBERTS
8
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il y a 18 heures

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