J'avais déjà tressailli à la lecture du tome consacré à la PJ du 36, mais l'immersion dans le quotidien de la brigade des mineurs laisse une impression tout aussi durable. Comme l'avait été le film Polisse, en son temps. Revoilà le duo composé par un journaliste et un dessinateur dans les locaux d'un service de police sensible. Le découpage par affaire nous plonge à chaque chapitre dans les affres des enquêtes sordidissimes menées par des gens aussi convaincus que résistants. Plus que le lecteur, parfois, tant les affaires évoquées plongent au tréfonds des sacs de nœuds les plus sombres de l'âme humaine. S'en prendre à qui que ce soit, ça provoque déjà un malaise, mais quand les victimes sont des mineurs et qu'en plus les délits ont une grosse connotation sexuelle, ça rajoute une bonne couche d'inconfort. On sait bien que certains de nos contemporains ne vont pas tellement, tellement bien, mais contempler de front leurs dérapages ne remplit pas de bonheur, loin de là. Et malgré tout, c'est ainsi que nous sommes, pour l'instant. Et depuis un moment. Et à lire ces pages on dirait que ça n'est pas en passe de s'arranger dans les minutes qui viennent... Mais sans épiloguer davantage sur ces histoires de prostitution, de pédophilie, de gland introduit par inadvertance dans l'anatomie d'une gamine de 12 ans, etc., je tiens à souligner une fois encore le délicat équilibre entre les (magnifiques) dessins de Titwane, qui fait merveille à croquer les physionomies aussi bien que les bâtiments ou les ambiances parisiennes nocturnes, et les textes qui les accompagnent, savant mélange d'impressions personnelles et de restitutions brutes des dialogues hallucinants qui ont lieu dans les locaux de la brigade des mineurs. Un témoignage précieux sur les maux de notre époque et les réponses bricolées souvent bancales qu'on tente de leur apporter.