Portait humain complexe et intelligent, servi par un style unique.
Lire Dessous, c'est plonger au début du 20ème siècle et se retrouver dans les quartiers pauvres de l'east-side du New-York de l'époque, c'est avoir la sensation d'être au cœur d'une communauté juive très fermée, vivre au fil des pages la souffrance d'une population immigrante. Ça aurait pu n'être que ça. Mais c'est bien plus.
Lire Dessous, c'est entrer dans l'intimité de Esther et Fanya, deux soeurs jumelles aussi différentes de caractère que ressemblante de corps. C'est voir chacune des deux évoluer en parallèle, prendre des chemins que tout oppose, mais, chacune à leur façon, tout faire pour s'éloigner de leur mère si ignorante, dure et traditionaliste, s'émanciper, s'affirmer en tant que femmes libres.
Cette BD est très riche, mais ce que j'en retiens le plus, c'est une ode à la femme.
Dessous, c'est comme un gâteau au chocolat noir: amer et doux à la fois, émouvant, qui rassasie mais qu'on voudrait pouvoir continuer de manger. Oui, j'aime beaucoup le chocolat...
Et puis, il y a le dessin. Un graphisme noir et blanc, qui a son identité propre. Pas de lignes droites, tout est rond, les traits sont épais. Rien n'est uniforme: chaque chose semble dessinée avec un style qui varie.
Ce style me plait, parce que, derrière son aspect plus abstrait que réaliste, j'ai trouvé qu'il avait quelque chose d'organique, autant pour la nature que pour les personnages, rendant ceux-là humains; l'imperfection du dessin reflétant l'imperfection de leur personnalité.
C'est peut-être mes yeux qui sont mal vissés, mais certaines pages sont plus réussies que d'autres.
Cela dit, on peut y trouver à redire. Mon problème avec le dessin irrégulier: on a plus tendance à s'y arrêter. En effet, si le dessin tient une qualité continue, on suivra plus la trame. Mais si on lit trois pages "grossières" et que, d'un coup, on tombe sur un tableau qui en met plein la vue, on risque de s’arrêter dessus, au détriment du suivi de l'histoire.
Mouais. Si ça c'est pas du pinaillage...
Mais la vraie raison qui me pousse à ne mettre que 7, c'est que j'ai trouvé certaines mise en pages maladroites, et que la construction de l'histoire, volontairement décousue, l'était parfois trop à mon goût, le style graphique de l'auteur ne permettant pas forcément ce genre de fantaisie.
Malgré ces bémols qui peuvent gâcher la fluidité de lecture, j'avoue ne pas avoir mis longtemps à dévorer ce petit bijou.
Cette critique est déjà beaucoup trop longue, surtout pour pas dire grand chose au final, mais retenez ceci: communauté juive immigrante, récit humain et touchant, parcours de vie passionnant de deux femmes liées, noir et blanc envoûtant.
Qu'est-ce que vous attendez? Vous êtes encore là? Lisez-le!