Le roman photo est tombé en désuétude. Venant à sa rescousse sur le tard, les éditions Glénat n'écoutèrent que leur courage - ainsi que le doux son des billets de banque - et prirent le parti de lui redonner une deuxième jeunesse de manière purement désintéressée.
Quelques esprits chagrins, d'où émanaient des thèses douteuses, allèrent néanmoins jusqu'à étaler leur ingratitude au point de réprouver cette initiative salutaire. Ceux-là - des cerveaux malades - se perdirent dans des conjectures immondes, supputant même que Glénat aurait cherché à traire les lecteurs de Dragon Ball à moindre frais. Le complotisme a la vie dure.
Bien qu'il n'y ait rien à en dire - rien de bon en tout cas - je ne sais tout simplement pas par où commencer. Glénat, en nous prenant pour des cons avec cette insolence crasse qui les caractérise, m'a tout simplement scié. Peut-être avez-vous vous-même été victime d'une situation similaire, quand une de vos connaissances ment éhontément et avec aplomb à la face du monde sans que personne ne la recadre. Pris au dépourvu, trop naïfs et purs que nous sommes, nous ressortons d'une pareille épreuve le souffle coupé. On en vient tout naturellement à s'enquérir du comment de la chose. Comment peut-on se foutre du monde à ce point en espérant ne pas se faire prendre ?
Sans doute suis-je trop honnête pour bon bien - et cette critique le démontrera - mais, à avoir recours à une scélératesse de cet acabit, je redouterais de chaque fibre de mon corps d'avoir un jour affaire à la critique. Que répondre à leur place ? Je me verrais balbutiant, suer à grosses gouttes, prétendre avoir un rendez-vous important et finir par me cacher dans les toilettes publiques les plus proches pour pleurer à chaudes larmes. Le sens de la culpabilité n'est pas un sentiment qui me soit inconnu ; c'est d'ailleurs à ce titre que jamais je ne pourrais travailler pour les éditions Glénat.
Satan lui-même aurait eu des remords. Que la franchise ne soit pas le fort de certaines grosses boîtes amassant de l'oseille par pelletées, j'ai fini par me faire une raison ; mais comment diable s'imaginaient-ils ne pas se faire prendre ? La manœuvre est si grotesque qu'on ne peut littéralement voir que ça. Ça, et un roman photo constitué d'images de la version animée mal découpées. À quand Dragon Ball Z : Le manga inspiré de l'adaptation de l'anime adapté du comics de la série télé ? Puisque ces gens là n'ont aucune limite, pourquoi s'arrêter en si bon chemin ?
Pensez-vous qu'une pareille initiative fut sanctionnée par le lectorat manga francophone ? À l'heure où j'écris cette critique, Dragon Ball Z : Anime comics de la série télé figure à la vingtième place du top 100 manga SensCritique. Étant de ceux qui expriment leur mépris par le silence, je n'aurai rien à ajouter à cela. Que ceux-là qui incluent un roman-photo dans leur top Manga s'abstiennent toutefois de jamais commenter la moindre de mes critiques ; je pourrais manquer de réserves quant aux qualificatifs dont je serais susceptible de les affubler.
Aussi longtemps qu'il s'en trouvera pour mettre la main à la poche en réponse à une manœuvre éditoriale aussi abjecte, ces dernières ne pourront que prospérer et se multiplier à l'avenir. Finalement, j'en veux moins à Glénat qu'au lectorat hydrocéphale prêt à payer rubis sur l'ongle une chiure dont je ne me servirais même pas pour allumer un feu de cheminée.
Lorsqu'on n'a aucun talent mais envie de vivre de ses inaptitudes, on capitalise sur la connerie humaine ; un placement sûr aux rendements conséquents. Le filon est intarissable pour peu que l'on ait aucun scrupule à l'exploiter.
Eh quoi ! On ne peut plus se foutre du monde en cherchant à en tirer un profit certain ? C'est encore sur ça que repose Glénat ; et l'affaire ne date pas d'hier. Je passerai les couleurs criardes aux nuances quasi absentes du dessin tiré de la version animée. Sans doute ont-ils soigné les finitions au feutre afin de faire des économies de toner.
Non, avant cela, Glénat s'est toujours trouvé à l'avant-garde du dédain pour le genre manga. Là où les maisons d'édition de mangas en France se spécialisent uniquement dans ce domaine - attestant d'un intérêt certain pour le support - Glénat a simplement couru après ce qui avait du succès à une époque donnée. «Dragon Ball et Ranma 1/2 ont fait florès auprès des mongoliens travaillés au corps par le club Dorothée ? Qu'à cela ne tienne, nous importerons ces japoniaiseries comme nous l'avons fait avec Akira».
Certains doutent encore du mépris de Glénat envers les lecteurs de mangas ? J'inviterai ceux-là à acheter les anciens volumes de Dragon Ball publiés chez eux. Non seulement la qualité du papier surclassait tout juste celle du papier-cul avec des pages qui se détachaient systématiquement (surtout avec les volumes compilant deux tomes), mais ces éditeurs ont tellement eu le nez creux qu'ils adaptèrent les mangas de sorte à ce que la lecture se fasse de gauche à droite. On retrouve alors Goku en train de se tenir le cœur à droite entre autres détails truculents. Ce n'est qu'avec la pression d'une concurrence éditoriale, elle, consciencieuse, que Glénat finit par se résoudre à repenser la qualité de son produit. Chez eux, rien n'a jamais été pensé, tout a toujours été expédié.
À leurs yeux, le manga n'était qu'une fange adressée à des porcs goulus. Voyez comme ils considèrent leur lecteur ; à l'aune de ce regard porté sur nous, Dragon Ball Z : Anime comics de la série télé prend tout son sens. Glénat n'est pas spécialisé dans l'édition manga mais dans la thune à tout prix.
Eurent-ils eu un semblant de respect pour ce qu'ils adaptaient qu'ils auraient pu opter pour la colorisation du manga comme cela fut entrepris sur divers tomes au Japon. Pareil rendu sur quarante-deux tomes aurait exigé un travail colossal qui, pour le coup, aurait mérité un salaire conséquent. Glénat comprend le principe du salaire en omettant celui du labeur. Ils ne veulent pas être reconnus pour le soin apporté à leurs adaptations mais se faire des couilles en or en raflant aux petits éditeurs les mangas ayant du succès au Japon.
Glénat n'est qu'un preneur d'otage habile qui aura su braquer son arme sur quelques chefs d'œuvre du genre pour se faire une renommée dans l'édition manga. Comment appeler au boycott contre ceux-là même qui ont adapté Akira, Dragon Ball, Blame!, Ashita no Joe, Berserk ainsi qu'une myriade d'autres mangas incontournables ?
Si l'on ne peut pas vivre sans eux dès lors où il est question de se pourvoir d'une mangathèque digne de ce nom, ayons au moins le bon sens de ne pas les encourager à nous entuber en achetant ce qui se présente comme le plus insigne manque de respect adressé aux lecteurs assidus de mangas.