Chlorophylle sort de son hibernation
Ne dit-on pas que les vrais héros ne meurent jamais? C’est manifestement le cas aussi dans la bande dessinée: après la résurrection de Blake et Mortimer, voici le retour d’un autre personnage mythique de la BD franco-belge des années 50 et 60: le lérot Chlorophylle. Apparu pour la première fois dans le journal de Tintin en 1954, ce petit animal courageux créé par Raymond Macherot a passionné une génération entière de lecteurs. Tous ceux qui ont lu un jour les aventures de Chlorophylle et de son inséparable comparse Minimum ont été marqués par cet univers animalier poétique et coloré. Des histoires pour enfants dans lesquelles Macherot abordait, sans avoir l’air d’y toucher, des thèmes parfois plus adultes, comme le faisait Peyo dans "Les Schtroumpfs". En imaginant le personnage d’Anthracite, un rat noir avide de pouvoir et d’argent, Macherot était également parvenu à créer un méchant très réussi, ce qui constitue évidemment un must pour toute bonne série qui se respecte. On retrouve Anthracite dans "Embrouilles à Coquefredouille", la nouvelle aventure de Chlorophylle… même si en réalité, ce n’est pas le vrai (qui, lui, est mort). Comment est-ce possible? Tout simplement parce que dans l’histoire imaginée par le prolifique scénariste Zidrou, Chloro et Minimum sont invités à Coquefredouille par le Roi Mitron 1er afin d’assister à l’avant-première d’un film inspiré de leurs exploits. Un film dans lequel on retrouve le méchant Anthracite, interprété par la star Antonio Caméo, tandis que le rôle de Chlorophylle est interprété par une autre star: Luigi Starletti. Mais la réalité ne va pas tarder à rejoindre la fiction, et nos deux héros vont se retrouver plongés au milieu d’attentats orchestrés par les partisans de la Fredouille indépendante, dont l’objectif est de faire en sorte que leur petite région riche et industrielle se sépare du reste de l’île de Coquefredouille. Toute ressemblance avec des faits réels est évidemment loin d’être fortuite… La force de ce Chlorophylle nouvelle version est, en effet, de combiner un graphisme très proche du style très vintage de Macherot avec un scénario beaucoup plus moderne. Le récit de Zidrou intègre ainsi quelques clins d’oeil plutôt amusants à notre époque actuelle, avec notamment une star de cinéma qui fait son "coming out" et un roi qui a du mal à reconnaître sa fille illégitime. Là aussi, le clin d’oeil à l’actualité est plutôt appuyé. Au final, on est donc loin de la poésie des albums de Macherot, mais cette modernisation signée Godi et Zidrou, le tandem à succès de la série "L’élève Ducobu", réussit malgré tout son pari de ressortir ce bon vieux Chlorophylle de son hibernation… au propre comme au figuré! "Certains puristes râleront de voir ressusciter le petit monde de Macherot", expliquait récemment Zidrou dans le journal de Spirou. "Mais notre reprise n’est dictée que par notre amour de ce grand auteur. Si nous étions intéressés par l’argent, nous aurions plutôt fait un Ducobu de plus!"
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