Un livre photo BD
Michel Setboun transforme ses photos journalistiques en dessins noir ou blanc. Une idée qui n'apporte pas grand chose, sinon rien. Et le texte est très souvent inutilement prétentieux. Mise à parts...
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le 20 juil. 2019
Michel Setboun est un photographe qui s'est trouvé au coeur de la révolution iranienne. Pas seulement car il l'a vécu en tant qu'observateur, mais car certaines de ses photographies sont devenues iconiques, soit du point de vue occidental, soit du point de vue islamiste.
Il livre ici un récit par points de passage de la révolution iranienne, de juin 1978 à début 1980 (la fin du mandat de Jimmy Carter). Le livre est illustré, parfois en pleine page, de photographies retravaillées : Setboun en a forcé les contrastes et a redessiné les contours pour en faire des illustrations de type bande-dessinée. Ce parti-pris esthétique n'est cependant pas le point fort du livre de mon point de vue.
Car ce livre permet de voir de l'intérieur une révolution que l'on cantonne souvent à une régression islamiste. Or au départ, il y avait une véritable aspiration démocratique. Comment cette énergie s'est-elle détournée vers le nationalisme et le fondamentalisme ? Le livre fournit des éléments de réponse à partir de récits concrets : l'hyperviolence et les tentatives de déstabilisation de l'opposition par la police politique du Shah ; l'assimilation de la modernisation de carton-pâte du pays à l'impérialisme américain et l'autoritarisme ; par opposition, la frugalité de Khomeyni et sa ruse ; l'émergence de lieux de mémoire qui cristallisent la mobilisation populaire, comme le cimetière de martyrs à la colline Qaytarieh à l'extérieur de Téhéran ; l'utilisation clandestine mais de plus en plus massive de l'imagerie autour de Khomeyni (cassettes pirates qu'on dupliquen, photographies de Setboun qui deviennent de grandes affiches dans les manifestations) ; circulation d'armes après la défection de l'armée...
Le livre ne donne pas toutes les clés de la révolution iranienne (pour cela, lire Le Shah de Riszard Kapusckinsky est un bon complément), mais il faut bien reconnaître que Seitboun a souvent été là au bon moment : quand le Shah organise de fausses manifestations à sa gloire par des activistes payés, quand les premières commémorations de martyrs ont lieu, quand les premières statues royales sont descellées (difficile travail). Il a été jusqu'à faire un Téhéran-Paris juste pour pouvoir être dans l'avion de retour du Shah, quand Arafat passe faire coucou à l'ayatollah. Il manque quelques points, comme la crise des otages américains, bien sûr. N'empêche.
A noter qu'on sent une sorte de fascination pour la figure écrasante de Khomeyni, dont Seitboun, par ses photographies, a contribué, volens nolens, à affirmer le mythe.
On peut reprocher à ce livre quelques lacunes "pédagogiques", comme une carte assez sommaire de l'Iran, l'absence de chronologie ou d'index, mais il ne vise pas à être une synthèse exhaustive. Ce sont les souvenirs d'un journaliste qui ouvre pour nous une boîte à chaussure emplie de vieux clichés qu'il a retravaillés, et qui partagent avec nous ses souvenirs. Ce n'en est pas moins évocateur, comme toutes les tranches de vie.
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Créée
le 31 mai 2020
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