À portée de voix
Quoique la présentation de son auteur puisse laisser penser, laquelle accumule les formules toutes faites du discours sur l’art contemporain (1), le Bruit des mots n’est ni pompeux, ni creux, ni...
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le 23 juil. 2019
Quoique la présentation de son auteur puisse laisser penser, laquelle accumule les formules toutes faites du discours sur l’art contemporain (1), le Bruit des mots n’est ni pompeux, ni creux, ni dépourvu d’âme. La petite centaine de planches de l’album, la plupart en une page, quelques-unes en deux, donnent en effet à voir, ou plutôt à lire, divers monologues ou dialogues – quelquefois pensées, certains imaginaires, d’autres tout à fait audibles dans la rue, dans une chambre ou au restaurant.
Ils vont du pur bavardage pseudo-métaphysique à la punchline malgré elle d’une phrase, en passant par le mantra d’un réfugié sur un radeau (« Faut pas que je m’endorme !… / Faut pas que je m’endorme !… ») et font la part belle à ces inepties quotidiennes, à ces justifications qui ne font qu’enfoncer celui qui se justifie, à ces paroles creuses tout aussi révélatrices qu’un discours construit.
Le trait assez froid de Germain Huby concourt à l’unité de l’album, et met en valeur, par contraste, la cruauté de la plupart des situations qui va souvent jusqu’à l’humour noir. Et paradoxalement, ce dessin, mais aussi l’enchaînement des répliques et un jeu sur les cadrages parfois brillant participent au dynamisme de l’album – alors que s’agissant d’histoires en une case, on pouvait craindre quelque chose de très statique.
Je doute que le Bruit des mots devienne un jour un classique de la bande dessinée, et ce n’est pas une œuvre dans laquelle on se plonge ou se replonge, mais enfin il a aussi le mérite de se laisser feuilleter quelques secondes quand on l’a à portée de main.
(1) Au point qu’on y soupçonnerait presque une parodie : « pratique artistique multimédia », « matériau direct », « joue avec les modèles », « dérives de cette société contemporaine », etc. (C’est sur le rabat de la quatrième de couverture.) Elle pourrait donner un lieu à un de ces bingos fantaisistes qu’on trouve sur les réseaux sociaux…
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le 23 juil. 2019
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