On dit «Merci Shingo Araki et Michi Himeno»

J'ai si peu de choses à dire sur cette idole qui n'appelle qu'à sa propre immolation que j'aimerais le dire fort plutôt que longuement. Après tout, quand il n'y a rien à sauver, pas même les meubles, autant laisser l'incendie se déchaîner.


Si habituellement je ne lâche que peu de 10, il en va de même pour la plus basse note qu'il me soit permis d'attribuer sur ce site. Car si l'excellence absolue est difficile à atteindre, la médiocrité sans borne et sans frontière se révèle rarement à nos yeux. Et pourtant, Masami Kurumada a su la produire. La pondre même. Car pareille création ne peut sortir d'un cerveau ; plutôt d'un orifice.
Les mots sont durs, mais ils sont justifiés.


Sans avoir parcouru toutes les critiques (on me pardonnera), les mots «Club Dorothée» reviennent souvent tâcher la feuille des divers auteurs. Je ne dérogerai pas à la règle. En France (et pas que), la notoriété du manga tient à son animation. Et encore, cela se limite à un arc narratif en particulier. On parle là d'une animation qui a drapé des plus fines soieries un âne syphilitique afin de le faire passer pour un cheval de course. Et ça a pris. Oui, merci monsieur Shingo Araki. Shingo Araki qui est le directeur d'animation qui aura su faire entrer Saint Seiya dans la légende. Sans doute devrais-je lui dire «merde» plutôt, car il aura contribué à faire entrer dans la postérité un auteur de Shônen, qui, sans lui, serait resté bien au chaud dans l'oubli, sa terre de prédilection.
Saint Seiya en version animée, c'est des décors et des personnages lourdement retravaillés graphiquement (notamment par la talentueuse Michi Himeno). Tout, en gros. Plus rien à voir avec les dessins de Kurumada remettant en cause à chaque nouvelle planche tous les préconçus que j'avais sur la perspective en dessin.
La musique aussi. La version animée aura su marquer son époque, c'est indéniable. Alors en France, patrie de AB productions (et d'autres trucs) on a un rapport vicié par rapport à ce manga qui, au fond, doit son succès d'une part au travail des autres mais aussi à la nostalgie. Sauf qu'avec moi, ça prend pas.


J'ai mentionné les dessins brouillons et confus, mais j'aurais pu insister sur le style. Là où, dans le milieu de la décennie 1980, les apparences classiques et formatées des personnages calqués sur l'ère Tezuka avaient déjà changé radicalement, un auteur restait à la traîne. Un certain monsieur Kurumada. Aucune recontextualisation sur le plan de la période n'a a m'être objectée alors que durant les mêmes années paraissait Hokuto no Ken entre autres œuvres graphiquement irréprochables.


Et le dessin, c'est encore ce qu'il y a de plus digeste. Nous abordons l'histoire. On brode d'un chapitre à l'autre. Le rythme y est, l'action est toujours au rendez-vous. Mais ça s'agite comme pour convulser afin de ne pas laisser de répit au lecteur et ne pas lui laisser l'opportunité de réfléchir un instant. Car à compter de la seconde où l'on se pose et que l'on y réfléchit, l'intrigue ne pèse pas bien lourd. Le rendu en est d'ailleurs si prévisible à de nombreux endroits qu'un lecteur avisé finirait par se croire doté de dons extralucides tant tout est téléphoné. Permettez une courte balise spoiler.


Les gentils gagnent.


Et tout le temps. Contre des adversaires immensément plus forts. La narration peine à nous faire avaler la pilule. Les héros sont nés de la dernière pluie et ont, pour une raison inexpliquée, plus de talent que les autres chevaliers de bronze, d'argent et d'or. Faut faire avec.
En dehors du quatuor maudit (quintet si on y agrège le providentiel Ikki qui apparaît sporadiquement pour offrir sa caution «rebelle» et sauver son inverti de frère), qui ? Qui pour susciter le moindre intérêt ? Des personnages secondaires ? Chez l'auteur, ce groupe nominal est synonyme de «faire-valoir». Exit les chevaliers de bronze (à quoi ça a servi d'offrir un Flash Back à Jabu ?). Ceux d'argent ? S'il vous plaît, ne me faites pas rire. Nous reste les douze dorés (le compte n'y est d'ailleurs pas) afin de garnir le bestiaire d'alliés éventuels. Et encore, que les plus marquants.


De la mièvrerie d'un autre temps sur l'amitié la camaraderie à la japonaise et tout le tintouin, vous allez en déguster. Quand on ne sait pas cuire un plat, généralement, c'est qu'on est aussi incapable de l'assaisonner correctement. Aucune surprise de ce côté là. Les personnages - toutes catégories confondues - sont plats, archétypiques au point où on les prendrait pour des photocopies de personnages de fictions antérieures (et pas les meilleures), une schéma narratif centré autour d'Athéna qui tient debout par la grâce de Dieu (oui, y'aura du scénario demoiselle en détresse, bon appétit si vous n'avez pas déjà tout vomi). Rien-à-sau-ver.


Les palpitations, vous les trouverez dans les artifices chiadés de l'animation d'Araki et la mise en scène de l'anime - oh cette musique, un délice - mais pas dans quoi que ce soit qu'aura pu vous faire parvenir Kuramada jusqu'à l'écran. Saint Seiya, un matériau brut sans avenir qu'un des plus grands artisans de l'animation sera parvenu à faire briller au prix d'un travail qu'on devine colossal. Voilà son seul mérite. Il est injuste qu'à terme, ce soit le matériau qui soit applaudi et non pas celui l'ayant travaillé méthodiquement. Et j'écris «matériau» pour ne pas écrire un autre mot commençant par la même lettre.


PS : Après lecture de Fairy Tail, j'ai déterminé qu'il existait bien pire encore et ai par conséquent décidé de ré-hausser la note de Saint Seiya d'un point.

Josselin-B
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le 2 janv. 2020

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Josselin Bigaut

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