Tout d'abord, il est honnête de préciser que je suis très fan de la production de Bryan O'Malley, que j'ai attaquée dans un ordre totalement dissident, en commençant par Scott Pilgrim, pour continuer avec Seconds et finir par Lost at Sea.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que la première BD de l'ami Bryan se démarque pas mal de ses autres œuvres, le ton y est beaucoup plus sombre et bien moins enclin à l'humour.
Lost at Sea touche quelque chose de très juste à propos du malêtre adolescent: cette capacité qu'ont certains à dramatiser leurs malheurs, souvent pas si tragiques, à les retourner dans leurs têtes, encore et encore jusqu'à en faire une obsession, à se persuader d'être atteints de psychose, à somatiser une névrose plutôt que de reconnaître qu'ils sont simplement malheureux, trop seuls ou blessé (ou un peu des trois) et chercher à sortir de leur tristesse.
Raleigh raconte son histoire d'un point de vue totalement subjectif et le récit est centré sur les pensées de la jeune fille. Le monde autour d'elle, ses compagnons de voyage les premiers, semblent fades, comme posés entant que toile de fond.
Mais à mesure que le temps passe, que l'amitié entre Raleigh et ses différents compagnons mais avant tout Stephanie se crée et se renforce, que la jeune fille se livre telle qu'elle est à ses amis le monde semble devenir plus consistant, plus vibrant et plus réel. Les conflits intérieurs de Raleigh s’effacent quelque peu pour laisser place aux dialogues des protagonistes
Une histoire de rétablissement par l'amitié et la resocialisation qui se termine d'une façon tout à fait symptomatique des productions de O'Malley: un renouveau qui ne résout pas tout, loin de là mais qui laisse espérer à un avenir meilleur.
Il y a quelque chose que je trouve exceptionnel chez chez Bryan O'Malley, c'est la compréhension qu'il a des adolescents et des jeunes adultes.
Raleigh est ici "l'adolescente" dans une proportion quasi universelle. Je pense que nous avons tous connu une Raleigh, une jeune personne terriblement repliée sur elle-même, intensément mélancolique et borderline qui a souvent, sans s'en rendre compte, un besoin vitale de l'oreille attentive et de la présence d'un ami sincère et compatissant.
Et je crois honnêtement que c'est ce qui fait que Lost at Sea n'est pas que le récit larmoyant d'une jeune fille tournée sur elle même mais une œuvre foncièrement juste et bonne.