Avant Onani Master Kurosawa, il y avait Chikan Otoko, "Molester Man" (comment traduire le mot "molester" en français ?...), ou la pathétique histoire d'un loser pris par erreur pour un pervers qui va sauter sur l'occasion, entrer pour la première fois en contact avec une fille et, peut-être, enfin devenir un homme. Il sera aidé dans sa tâche par les gais lurons de 2chan, ce qui devrait déjà vous mettre la puce à l'oreille quant à ce qui va suivre.
C'est une histoire de passage à l'âge adulte bien sûr, adressée par un herbivore à d'autres herbivores, mais qui se moque constamment des codes du genre - le personnage principal n'est pas innocent, son rêve n°1 est de perdre sa virginité, et il assume pleinement n'être qu'un raté parmi d'autres. Changer qui il est, ce sera aussi changer son état d'esprit.
J'aime Chikan Otoko pour les mêmes raisons que j'ai adulé Onani Master Kurosawa : c'est une oeuvre qui parlera à tous les jeunes hommes quittant à peine le lycée, et même si nous ne sommes pas tous des ratés en quête d'un peu de validation, chacun y trouvera son compte. C'est stupéfiant d'authenticité, lucide, drôle, émouvant (ce rendez-vous !), bourré de références, et il y a un masturbateur anthropomorphe nommé Sachiko qui accueillera à bras ouverts notre héros quand celui-ci sera rejeté par sa belle.
Voici quelques chapitres de l'histoire d'un médiocre qui se cherche une copine, apprend à rire de lui-même, et au final ressort de tout ça un peu grandi, un peu changé; ça me fait rire et ça me parle. Dans le fond, je crois que c'est tout ce qui compte, et je suis heureux d'avoir partagé ces quelques heures de lecture en bonne compagnie, comme quand on rentre le soir avec les copains, quelques bières en travers du gosier, que les esprits se délient et que la souillure se répand librement. A ce moment-là on partage quelque chose de viril, d'immature et de fort, qu'on laissera derrière nous comme un témoignage des étapes franchies, et de celles qui nous restent à franchir.