De même qu’on ne sait pas très bien si le titre de l’album est Чернобыль ou Tchernobyl ou la Zone, je ne sais pas très bien si ce roman graphique est un demi-échec ou une demi-réussite. Disons qu’il est finalement assez quelconque.
Trois parties se succèdent, chacune consacrée à une génération d’une même famille d’habitants de Pripiat. Ça commence quelques semaines (mois ?) après la catastrophe, puis un peu avant, puis pendant, puis juste après, puis vingt ans après. Et malgré ces morcellements, le récit peine à prendre du rythme. Peut-être est-ce lié à l’approche des auteurs, plus soucieux de montrer des tranches de vie quotidiennes que de faire dans le sensationnalisme. Cette démarche est tout à leur honneur, mais ne suffit pas à rendre une intrigue, d’autant que le sujet a été traité et retraité par ailleurs, dans des œuvres qui mettaient mieux en relief les passages obligés de toute évocation de la catastrophe – l’impéritie des autorités, les déchirements intimes, la grande roue jamais inaugurée… (Peut-être que de ce point de vue, Tchernobyl – la Zone a paru vingt ans trop tard.)
Lorsqu’un scénario laisse une aussi grande place au silence – et en l’occurrence un silence qui n’augure d’aucun secret, d’aucun suspense, puisque avec Tchernobyl tout est consommé –, on attend que le dessin prenne le relais. Or, j’ai trouvé le trait de Natacha Bustos assez faible. Non qu’il soit techniquement raté, mais le parti pris de réalisme rend ici l’ensemble extrêmement plan-plan.