On associe souvent les mangas et plus généralement les bandes dessinées à un simple média de divertissement.
Nous, les lecteurs fidèles, on sait depuis longtemps que c'est faux mais il est toujours bon de le rappeler.
Et si y a bien une oeuvre qui peut convaincre les sceptiques, c'est bien celle-ci.
Au départ, ce qui m'a attiré dans Silent Voice, c'est la thématique du handicap.
On y découvre dans le premier volume la jeune Shoko, malentendante et qui doit faire face aux brimades de ses camarades notamment Shoya, la "petite terreur" de la classe.
Et dès le départ, la mangaka Yoshiitoki Oima ne nous épargne pas.
Hormis le traitement du handicap puis du harcèlement à l'école ( un harcèlement qui va se retourner contre Shoya qui va passer de "bourreau" à "victime" et donner une toute autre tournure à l'intrigue ), elle nous livre une vision de l'école primaire au Japon assez alarmante.
Une école qui te pousse à la compétition et qui n'accepte pas la différence et les faiblesses.
Du coup, le handicap devient aussi bien physique ( Shoko qui essaie de se faire accepter comme elle peut, de faire face à ses faiblesses par le sourire ) que social ( Shoya qui s'éloigne des autres au point de mettre des croix sur les visages des gens qui l'entoure )
Dans les 2 cas, c'est par le regard de l'autre que va arriver la solution, un regard qui ignore justement leur différences.
Par contre , tout ne va pas se faire dans la facilité. Il va falloir lutter, souvent contre soi-même, et passer les obstacles qui jalonnent la route de ses jeunes étudiants.
En 7 tomes ( avec un tome 6 particulièrement vibrant ), Yoshitoki Oima va aborder de nombreuses thématiques et on va comprendre petit à petit que plus qu'un manga sur le handicap ou sur le harcèlement, Silent Voice est avant tout le témoin du malaise de la jeunesse japonaise. Un malaise qu'on retrouve de différentes manières ( pression de l'école , pression des amis, pression familiale ) et qui aboutissent très souvent à des drames.
A aucun moment, la mangaka est tendre avec ses personnages, elle les présente avec leur force mais aussi leur faiblesse quite à écrire des échanges brutaux ( celui entre la mère de Shoko et Nao est particulièrement frappant ) et souvent poignants.
La fin d'ailleurs ne règle pas tous les problèmes. Y a une impression de renouveau mais elle laisse les personnages avec leur choix et leur vie à venir ( une fin ouverte comme souvent dans les mangas mais qui colle assez bien à l'ensemble , je trouve )
Silent Voice est un manga riche, magnifiquement dessiné et touchant par de nombreux aspects.
Dans ces moments où on parle beaucoup de harcèlement, d'intégration au collège , cette oeuvre devrait être lue par de nombreux élèves (voire même étudiée mais là, on serait dans un monde parfait).
Jamais larmoyante, souvent directe voire brutale dans son écriture des ressentiments , elle est une des œuvres qui réussit le mieux à parler de la souffrance adolescente et cela sans tomber dans la publicité moraliste.
A un énorme coup de cœur à faire partager aux plus grands nombres