Adrastée de Mathieu Bablet est une œuvre qui frappe d'abord par la magnificence de ses illustrations. Les décors et perspectives sont tout bonnement renversants, et pour ceux qui ont apprécié l'exploration labyrinthique de l'univers du manga Blame, vous serez subjugués par les balades visuelles que propose cette bande dessinée. Chaque page est un tableau, un véritable cas d'école que je recommande vivement à tous les néophytes et amateurs de dessin. C'est une BD qui, par sa beauté graphique, se pose en véritable objet d'admiration.
Cependant, cette splendeur visuelle masque difficilement le vide narratif qui traverse l'œuvre. L'histoire, centrée sur le périple d'un roi immortel à la recherche de réponses et d'une fin à son existence, se révèle rapidement vaine et répétitive. Si les thèmes de l'immortalité, du temps qui passe, et de la quête de sens sont fascinants en théorie, ils sont ici traités de manière si diffuse et contemplative qu'ils finissent par perdre leur impact. Le récit manque de profondeur, et les dialogues, souvent philosophiques, ne parviennent pas à véritablement captiver. On a l'impression d'assister à une errance, tant pour le personnage principal que pour le lecteur, dans un voyage qui semble se répéter sans réelle progression.
C'est d'autant plus regrettable que l'univers graphique avait le potentiel de soutenir une narration forte et poignante. Au lieu de cela, on se retrouve face à une série de tableaux magnifiques mais dénués de substance narrative. C'est une œuvre que l'on admire plus qu'on ne la vit, et malgré l'excellence du dessin, le manque de consistance dans l'histoire laisse une impression de vide.
D'ailleurs la mise en page est brillante, l'enchainement de case est loin d'être laissé au hasard et c'est ce qui est d'autant plus frustrant, car on constate qu'il y a là une réelle compétence narrative!
Adrastée est une bande dessinée où la forme l'emporte largement sur le fond. Les amateurs de belles images y trouveront certainement leur compte, mais ceux qui cherchent une histoire captivante risquent d'être déçus. Pour ma part, bien que subjugué par la beauté des illustrations, je ne peux m'empêcher de ressentir une certaine frustration face à la vacuité narrative.
En revanche, je vous invite très vivement à lire ou a relire les autres BD de Mathieu Bablet, qui a pu corriger le tir et plutôt deux fois qu'une. C'est un pur génie et j'irai très vite chanter mes louanges à ces autres sorties qui m'ont transporté!