Critique de Shaynning
Second opus de la série qui a gagné le Prix des Libraires du Québec dans la catégorie BD étrangère, "L'ombre de l'oiseau" est plus sombre et profond, mais prend place dans un monde plus élaboré,...
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le 23 oct. 2022
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Incontournable Octobre 2022
"Allergique" est une sympathique Bd jeunesse pour le lectorat intermédiaire, à la fois sur le rôle de grande sœur que sur les inconvénients des allergies sévères.
Maggie souhaite ardemment avoir un chien - ou n'importe quel animal poilu en fait. Dans une famille où ses parents s'apprêtent à avoir leur quatrième enfant, ses deux frères étant jumeaux et donc toujours ensembles et très complices, Maggie aimerait avoir son propre "partenaire". Seulement voilà, le jour prévu pour aller au refuge adopter un chien tourne au cauchemar quand la jeune fille fait une réaction cutanée sévère, qui la conduit aux urgences. Après quelques explications et un test qui lui révèle une allergie sévère aux poils et aux plumes, Maggie doit faire le deuil d'un potentiel animal de compagnie à poil ou à plume. Elle dresse une liste d'animaux reptiliens ou aquatique susceptibles de remplacer son chien perdu, mais elle cumule les échecs. À l'école, l'animal de compagnie de son groupe, un cochon d'inde, doit être retiré en raison de son allergie. Heureusement, elle fait la rencontre de Claire, sa nouvelle voisine, qui vit avec son papa plutôt permissif. Leur chimie est évidente et elles ont un réel plaisir ensemble, mais quand Claire adopte un chien, Maggie se sent trahie. Mais Claire et elle se réconcilieront plus tard, et vont élaborer une stratégie pour adopter, en cachette, une souris - à laquelle elle réagit également. Enfin, elle fait la connaissance de Sébastien, également sujet à une allergie, celle des œufs. Entre les hauts et les bas de son amitié avec Claire, le bébé qui arrive et son amour pour les animaux mit en berne, parviendra-t-elle à surmonter son sentiment d'exclusion et trouver sa place autant chez elle qu'à son école?
Pauvre Maggie, vraiment, je compatis. C'est assez désolant quand un de nos intérêts se trouve entravé par un truc aussi stupide qu'une allergie. Et quelle allergie! J'ignorais que l'allergie aux poils d'animaux pouvait être si grave. Elle en a des boursouflures rouges sur la peau des bras et du visage, c'est quelque chose! Le volet "allergie" est super intéressant et habilement amalgamé à l'histoire. On a une médecin qui nous vulgarise l'allergie d'un point de vue biologique et propose des injections supposées amoindrir la réaction allergique (mais hélas, ne peut pas la résorber totalement). Sébastien aussi nous en apprend sur le sujet.
J'ai envie de parler de "deuil" dans le cas de Maggie, car clairement, elle a des stades du deuil à vivre. Elle doit renoncer à quelque chose qui semble lui tenir très à cœur. En témoigne sa décision, vers la fin, de devenir biologiste marine, pour rester près des animaux, autant que faire se peut, sans se mettre inutilement dans une situation souffrante. Quand elle a décidé d'adopter sa souris, Maggie faisait du déni. Non seulement sa réaction allergique était présente, elle a inquiétait ses parents, qui pensaient voir leur fille mal réagir aux injections supposées amenuiser sa réactivité allergique. Maggie voulait tellement un animal de compagnie qu'elle a préféré sacrifier sa santé plutôt que renoncer.
En parallèle, nous avons le thème de l'amitié avec Claire et Sébastien. Le constat que je fais par rapport au personnage de Claire est le suivant: Claire semble avoir tout ce que Maggie souhaite, sans avoir l'essentiel. Claire a une maison silencieuse, un papa qui lui donne tout ce qu'elle souhaite, la santé qui lui permet l'arrivé de son chien, une chambre exquise et la quiétude d'une enfant unique. Néanmoins, on le constatera, Claire aussi souffre de solitude. Si matériellement elle n'est pas à plaindre, reste qu,elle ne voit presque plus sa mère et n'ayant pas de fratrie, se sent seule bien souvent. L'arrivé de "Cappi" semble d'ailleurs avoir la même vocation que celle envisagée par Maggie pour son chien potentiel: combler un vide. Bref, Claire et Maggie ont ceci en commun qu'elles se sentent seules, mais l'une comme l'autre ne comprendront pourquoi c'est le cas chez l'autre. Elles sont en réalité bien moins seules ensembles. Aussi, Maggie a également le défis de se refaire des amis, car malgré sa cinquième année ( du système états-unien primaire) , elle est envoyée dans une autre école.
Dans le volet "famille", on a le rôle de l'ainée, qui se sent parfois un peu laissé de côté, surtout avec un couple de jumeaux qui font tous ensemble et un bébé en route. Mais de temps à autre, je remarque des parents sincèrement concernés par leur fille. Maggie va évoluer beaucoup sur son rôle de grande sœur. Elle apprend que même la légendaire complicité des jumeaux peut avoir sa part de conflits. Liam, le plus sensible et calme de la dyade, trouve d'ailleurs du réconfort auprès de sa grande sœur. Maggie a aussi la chance de se découvrir des habiletés pour prendre soin de sa fratrie, surtout quand la maman part pour accoucher à l'hôpital. J'ai beaucoup aimé le traitement de la famille dans cette BD. C'est crédible, sincère et touchant. On voit que cette petite famille a de bonnes bases de communication, une affection inconditionnelle et beaucoup de complicité.
De manière générale, j'ai beaucoup aimé la résolution de conflits dans l'histoire, entre les divers personnages. J'ai aussi apprécié la diversité des ethnies. Maggie elle même n'est pas caucasienne, avec le joli teint olivâtre de sa mère. Il y a de l'humour, de la joie, de la tristesse aussi, une pré-adolescence en action et des changements à gérer. Je dis souvent que face aux réalités émotionnelles, pas besoin de surjouer le drame, comme le font souvent les auteurs/autrices des États-Unis. Mais pas ici. On reste dans un registre terre-à-terre et accessible, sans accumuler les drames. On se contente de surfer sur ceux en présence: celui du deuil de ne pas avoir d'animal de compagnie, de la jeune fille qui se sent différente et seule, ainsi que les changements au sein de la famille.
Sur le plan des illustrations, c'est joli et très propre. J'adore les couleurs chaleureuses. Un coup de coeur spécial pour les trois premières pages, celle du chapitre 1, avec les vue sur le quartier. Il y a de beaux jeux de couleurs et des une lumière qu'on ne voit pas dans les autres cases. La plupart des fonds sont monochromes, mais de temps à autre, ont voit aussi le décor. le trait est rondelet, le style assez près de celui des bédéistes américains ( Canada-É-U). On a de bonnes expressions pour les personnages, pleins d'angles de plans divers, c'est dynamique. Bref, c,est agréable à l'oeil et je pense que ça plaira aux jeunes filles- bien que, je le souligne, rien n'empêche les garçons de la lire aussi.
Une Bd facile à lire, qui respire la bienveillance, l'espoir et la chaleur, qui réussi à être aussi pertinent que ludique, avec un sujet relativement peu représenté en littérature jeunesse, concernant les allergies. Un tome qui pourrait être une série, mais qui peut se lire comme un tome unique. Avis aux ami.e.s des animaux!
Pour un lectorat à partir du second cycle primaire, 8-9 ans.
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le 2 oct. 2022
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