Critique de Shaynning

Après avoir si souvent entendu parlé de ce classique de la littérature canadienne, et qui prend place sur la magnifique île-du-Prince-Édouard, me voilà plongée dans cette BD qui relate les aventures d'une jeune fille fort peu ordinaire.
Matthew et Marilla Cuthbert, un frère et une sœur vivant en campagne, décident d'adopter un orphelin afin de les aider sur leur terre. Lorsque Matthew passe à la gare chercher ce dernier, il rencontre Anne, maigrichonne rouquine qui manie le Verbe d'une façon peu commune. Marilla est furieuse de constater que ce n'est pas le garçon promit et décide d'envoyer Anne dans une famille où elle pourra aider. Néanmoins, en constatant que la jeune fille ne sera très probablement pas heureuse et bien traitée dans ce foyer, Marilla prend la décision de la ramener , une fois de plus, dans leur maison aux pignons verts. Il lui faudra apprivoiser Anne, contrairement à son frère, qui s'y attache rapidement. Dans ce nouveau monde qui lui semble si beau, Anne entreprends de se créer une vie, à grand renforts de rêves et de créativité.
À bien des égards, Anne ( avec un "e") me fait penser à la petite Sara de Frances Hodgson Burnett, avec son imagination débordante, son propre code moral et son empathie. de plus, Anne s'inscrit, tout comme Sara, dans les jeunes personnages féminins cultes de la littérature jeunesse. C'est une jeune fille qui ne demande qu'à être aimée et s'évertue à devenir le meilleur d'elle-même en ce sens. Peut-être est-ce pour cette raison aussi que les gens autours d'elle semblent évoluer favorablement à son contact. C'est donc une grande qualité pour la petite rouquine. Si elle semble avoir tendance à avoir des émotions vives, on pourrait mettre ça sur le compte d'une nature passionnée. Cela lui donne d'ailleurs un air théâtral, un peu dramatique. Un contraste assez amusant compte tenu de la nature sévère et posée de sa mère d'accueil.
C'est donc difficile de ne pas aimer ce personnage, qui tente de trouver sa place dans le monde, avec sa volubilité hors-norme et ses scénarios grandioses. Parfois, quand elle parle de notions comme l'honneur, on la croirait arrivée d'une autre époque, alors que nous sommes déjà dans un roman d'époque.
Au fond, l'histoire d'Anne est simple: une orpheline adoptée ,un peu par erreur, par un couple campagnard et qui, finalement, y trouve le foyer dont elle avait besoin. Mais ce qui fait la magie de cette histoire est en grande partie due au personnage en lui-même, qui gagne à être connue autant par le lecteur que par les autres personnages de l'histoire, dans un cadre magnifique, celui de l'Île, avec ses jardins et sa nature nordique, ses saisons très contrastées typique du pays et ses habitants terre-à-terre. Une autre raison serait l'aspect familial. Au début de l'histoire, on sens que les deux Cuthbert semblent moroses, voir seuls et que l'arrivé d'Anne a changé beaucoup de choses. C'est par conséquent très émouvant de voir les changements s'opérer dans la petite famille, d'ailleurs assez originale dans sa composition.
Bien que je ne sois pas fan du style de dessin ( qui n'est vraiment le résultat que de mes gouts personnels), j'ai beaucoup aimé l'apport de cette nature généreuse, de ses saisons en couleurs et de la forte présence des fleurs. Après tout, la plus petite province du Canada est réellement magnifique et mérite qu'on lui fasse justice. Spécialement l'automne, avec ses feuilles rouges. Et j'ai apprécié la variété dans les poses et la fluidité dans les mouvements des corps, à défaut d'aimer leur forme.
On saura tirer de l'histoire d'Anne beaucoup de valeurs et de leçons de vie, tout en vivant une panoplie d'émotions. C'est le genre de personnage qui nous en apprend et qui nous donne envie de la suivre dans ses péripéties.
Pour nos amis d'outre-atlantique, c'est également l'opportunité de mieux connaitre ce coin de pays et un pan d'époque canadienne.
C'est donc grandement séduite que je termine la BD, avec , bien sur, la ferme intention de lire la série du même nom. À mettre dans les mains des plus jeunes comme des plus vieux!