Si Canales était déjà reconnu pour ses talents de scénariste depuis Blacksad, on ne savait pas encore de quoi était capable le bonhomme en tant que dessinateur sur une BD complète.
Avec Au Fil de l'Eau, il fait le choix de nous livrer un one-shot tout en aplats noirs, un peu à la façon d'Hugo Pratt dont il reprenait le personnage fétiche quelques mois plus tôt. Si la comparaison s'arrête là entre les deux hommes, on ne peut nier que ce bougre de Juan s'en tire très bien sur le plan graphique. Tant dans la technique que dans le découpage ou les cadrages, on sent que l'auteur maîtrise très bien son support.
Le bémol réside plus dans la narration généralement trop maniérée de ce récit. Canales nous raconte l'histoire d'un vieil homme qui ne trouve plus de sens à sa vie, et insiste démesurément sur son côté las et fatigué. Ce que j'ai fini par trouver lassant et fatigant. Si l'auteur avait ancré son œuvre dans un parti pris expressionniste, il aurait été plus facilement digérable. Ici, dans un contexte actuel et réaliste, il m'a semblé lourdement misérabiliste.
Ajoutons à cela une histoire à mon goût peu intéressante, qui repose sur des bases trop peu solides pour être vraiment crédible, et dont les personnages manquent souvent de consistance malgré quelques réussites.
Malgré un regain d'intérêt en milieu de lecture, je n'ai pas été totalement convaincu par ce premier essai de Canales. J'espère cependant qu'il continuera à passer au pinceau de temps à autre.
Au Fil de l'Eau est bande-dessinée plutôt réussie sur la forme, mais dont le fond m'aura malheureusement laissé sur ma faim.