"Avant minuit" part fort : dans le Belleville interlope d’une fin de journée, chacun vaque à ses activités — les "objets trouvés" trouvent acquéreurs, les petites frappes frappent, les mafias luttent. Le décor est planté, le récit sera noir. Avec, en guise de péril jaune, une cargaison de clandestins confondue avec des téléviseurs, et un mystérieux "touriste" qui préfère les bas-fonds à la tour Eiffel.
Suffisamment d’éléments pour que le lecteur reconstitue les morceaux, suffisamment de zones d’ombre pour que son intérêt soit éveillé.
Le tout a de la tenue : l’unité de temps assure les unités de ton et de construction, le trait tout en mouvement renforce le dynamisme de l’ensemble, et la couleur traduit parfaitement l’ambiance équivoque — entre chien et loup, entre légalité et illégalité, avec notamment cette très belle séquence d’ouverture, muette, et criante de réalisme.
Et puis, à mesure que les portraits s’étoffent — l’homme de main sans envergure, « sa » prostituée en quête d’un rachat (au sens propre), le petit-chef mafieux, le parrain asiatique et ses sbires… — l’action commence à s’essouffler. Avec tout de même assez de suspense pour frustrer le lecteur qui ne disposerait pas d’"Après minuit".