Bakuman
7.2
Bakuman

Manga de Tsugumi Ōba et Takeshi Obata (2008)

AVIS SUR L'INTEGRALITE DE LA SERIE BAKUMAN !! Bakuman est une oeuvre aussi énervante, que prenante. Pour le coup, je vais commencer par le négatif puis rallonger vers le positif.



Bakuman est un manga à "l'idéologie douteuse."



J'ai piqué le qualificatif à un autre reviewer de sens critique (Khonda) mais c'est globalement ça, tant ça part d'un truc biaisé. Le but initial de cette bd est de montrer comment les mangas sont fait dans le Jump, à quel point c'est un univers ultra-contrôlé avec des auteurs qui ont des éditeurs qui travaillent avec eux et des rédacteurs au dessus d'eux. Une usine à faire "les meilleurs mangas" où le travail est constamment noté, où les auteurs sont sans cesse mis en concurrence. Ils parlent aussi des délais impossible à tenir, du système des assistants et d'à quel point ce travail vous bouffe la vie, ne vous laissant pas de quoi vous épanouir pour avoir une vie familiale correcte ou une vie


Mais comme les auteurs sont publiés dans le même Jump dont ils parlent des méthodes de travail, ils disent cela tout en disant à quel point c'est un bon système qui leur permet de faire les meilleurs mangas possibles. Et surtout comme c'est un "nekketsu" la compétition est vue comme une "bonne chose", complètement stimulante, un peu comme si au lieu de se mesurer entre mangaka, on se mesurait entre sportifs ou lors d'un tournoi de baston. Et si les personnages réussissent parfois à "contourner le système" les vrais méchants sont ceux qui ne respectent pas les règles (jusqu'à arriver à des systèmes complètement absurde comme le fait le personnage de Toru Nananime, méchant totalement improbable...)


Et pour le coup, on en arrive à des moments où le manga devient totalement immoral : Déjà il y a une vision de l'amour, complètement rétrograde et figée (soit on a un couple improbable qui ne se parle pas avant que tout deux n'aient atteint leurs buts professionnels, soit on a un couple où la femme supporte le mari en l'aidant et en acceptant de passer après son travail) mais surtout, ça offre une vision du travail où LE BURN-OUT est vu comme une BONNE CHOSE ! Les personnages passent leur temps à sacrifier leurs vacances, leur temps de sommeil et leur vie sociale sur l'autel du manga. On en arrive à ce moment hallucinant où l'un des héros est obligé de partir à l'hôpital se bat CONTRE son éditeur qui souhaite qu'il arrête de bosser pendant qu'il est hospitalisé. Et les autres mangakas de prendre la défense du dessinateur qui devrait avoir le droit de travailler sur son lit d'hôpital !


Déjà, quiconque ayant un tant soit peu tenté de bosser après une nuit blanche ou en enchaînant les nuits de 2 heures de sommeil le sait : quand on néglige le sommeil, on fait vite de la merde. Non, ici, mis à part un moment "tendu" à la fin du manga où Mashiro se prend une grosse phase de "crunch" dans la figure, grosso-modo, le manga nous dit que "le sommeil, c'est pour les faibles." Les personnages réussissent à aller en cours au lycée tout en bossant pour le Jump et à la fin, plusieurs d'entre eux arrivent à aligner deux séries en même temps.


C'est relativement impossible, mais bon après tout, dans les comics-book on a des gens qui arrivent à être avocat, médecin, politiciens et qui passent leur nuit à déjouer des crimes. Dans les fictions, les journées doivent durer 72h ou un truc dans le genre.



Mais Bakuman est un manga riche et prenant



Pourtant, j'ai lu l'intégralité des tomes et ce, sans déplaisir. Car, si on accepte ce côté "mise en concurrence" (que je trouverais parfaitement dégueulasse dans un autre job) et le côté "oui, le manga parfait est possible si on a la recette parfaite" l'histoire de rivalités, de mangas qui perdent ou gagnent des places, des nouveaux auteurs, des éditeurs, deviens ultra-prenante. Le récit de ce côté là, connait ses marques et mis à part les deux derniers tomes où plus aucun retournement de situation ne peut nous étonner (parce qu'on sait que le manga va se clôturer et qu'il doit bien finir....) le manga sait jouer des attentes, des déceptions, du suspens et insère très bien ses arcs narratifs. Ils arrivent à rendre exceptionnel des événements relativement simples (exemple, l'arrivé d'un nouveau mangaka, le fait qu'il y ai un cross-over entre deux séries ou la fin d'un manga est vu comme des rebondissements ultra-prenant...)


Et surtout les autres mangakas (les rivaux du duo de départ) prennent un peu de consistance et deviennent tous peu à peu sympathique. Surtout, à chacun d'entre eux correspond un style de manga différent à la fois dans leurs spécialités ET dans leur personnalité : Si Moritaka et Akito sont les avatars des auteurs du manga, Hiramaru l'auteur de manga comique a une vie exagérement comique, la dessinatrice de manga sentimentaux est toujours dans la cible d'intrigues amoureuses, le dessinateur de mangas de motos et de baston est un voyou-gentil et surtout, Eiji Niizuma, l'auteur de mangas fantastique... est un surdoué du manga qui est à la limite du superpouvoir.


Le graphisme est très bien : agréable, rond, expressif. Ce qui est d'autant plus bizarre qu'il est franchement plus cartoonesque que celui du premier "HIT" du duo : Death Note. L'auteur arrive même à changer parfois de trait pour dessiner les quelques planches des différents mangakas. Et petit détail intéressant, chaque chapitre se termine par quelques "nemus" (grosso-modo, le brouillon) du scénariste, ceux du dessinateur et la planche complète, permettant de voir les changements entre la phase de scénarisation, le découpage et l'aspect final. D'ailleurs le manga donne parfois des conseils viables sur la création des bande-dessinées. (Mais c'est un peu noyé dans le côté excessif du titre.)


Au final, Bakuman se lit agréablement et permettre d'en connaître mine de rien, le système éditorial japonais, parfois au point d'y épouser et de glorifier ses aspects les plus contestables.

le-mad-dog
6
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le 15 nov. 2015

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Mad Dog

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