Deuxième opus du diptyque Batman des fameux Jeph Loeb (au scénar') et Tim Sale (au dessin), la suite de « Un long Halloween » a généralement presque aussi bonne réputation que son prédécesseur, avec cependant quelques critiques concernant un sentiment de réchauffé. Effectivement, nous avons de nouveau affaire à un tueur opérant les jours de fête. Mais les ressemblances s'arrêtent là. Ce « Amère Victoire » (« Dark Victory » en V.O.) se révèle finalement légèrement supérieur à son illustre ainé sur pratiquement tous les points.

Déjà, l'enquête parait moins artificielle. Dans « Un long Halloween », chaque chapitre était consacré à une fête annuelle liée à un meurtre. Le procédé, répété 12 fois, finissait par devenir un peu lassant, surtout que l'enquête menée par Batman piétinait joliment. Tout l'intérêt reposait plutôt sur l'évolution de Harvey Dent, les autres personnages étant laissés un peu de côté. Dans « Amère Victoire », le modus operandi du meurtrier, bien que très semblable, n'est plus aussi lourdement souligné. Les protagonistes ont largement pris de l'importance, crédibilisant fortement l'enquête. Les motivations de tout le monde sont suggérées, le pouvoir mafieux de Gotham est bien mieux exploré et la plupart des personnages, loin d'être des figurants de séries policières, ont leur moment de grâce, particulièrement le trio de base: Harvey Dent, personnage aussi ambivalent que tragique fascine, et le comic prend le temps, cette fois, d'analyser l'impact de sa déchéance sur Gordon et Batman. Ce dernier, trop souvent dépeint comme un psycho-rigide robotique par Loeb, atteint enfin au sublime dans une scène de confession où, enlevant son masque, ses yeux reflètent une indicible tristesse qui ne peut que prendre aux trippes le lecteur. C'est dans ce contexte général de solitude et de perte de repères (brillamment analysé à travers pratiquement tous les personnages qui ont perdus quelqu'un/quelque chose) que l'apparition du premier Robin, Dick Grayson, fait sens et évite le ridicule généralement attaché au sideckick de Batou.

Hélas, arrivant un peu tard dans l'intrigue, les débuts mythiques de cette relation n'ont pas trop le temps d'être exposés même s'ils offrent au sein de ces pages quelques jolis moments. C'est l'une des grosses déceptions de cette BD, avec l'inutilité flagrante de la brochette de méchants (Joker, Poison Ivy, Pingouin,...), totalement survolée et ridicule (tous ces psychopathes obéissent gentiment à Double-Face parce que celui-ci leur a promis de l'argent... mais oui... !) ce qui se révèle extrêmement frustrant.

Les dessins de Tim Sale, enfin, se sont nettement améliorés depuis « Un long Halloween ». Ses héros sont plus beaux (surtout ses femmes, magnifiques !), sa mise en scène, déjà grandiose auparavant, touche ici au sublime, et presque chaque scène offre une nouvelle ambiance chromatique qui, si elles s'éloignent de l'hommage expressionniste d' « Un Long Halloween », n'en fait pas moins ressortir toute la majesté des planches de Sale.

« Amère Victoire » conclut en beauté les récits de jeunesse de Batman en proposant une histoire mature, plus cérébrale que musclée, à la fois très sombre et habitée d'une flamme d'espoir, matérialisée par l'arrivée d'un jeune garçon venant briser la solitude d'un milliardaire morose qui ne se serait jamais imaginé comme un père...

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le 26 avr. 2013

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Amrit

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