La BD humoristique "sociétale" est un genre difficile, mais aussi délétère (car qu'est-ce qui vieillit plus vite que le rire "aux dépends" de ses contemporains immédiats ?), que je n'ai personnellement jamais aimé, mais qui est - pourquoi, c'est un mystère pour moi - toujours éminemment populaire. Dupuy et Berbérian ne m'ont jamais non plus convaincus, sans doute du fait de leur attachement un peu trop sage aux codes de ce genre, qu'ils mêlent avec beaucoup de bon goût (bof !) à une mélancolie existentielle légère mais tenace. "Boboland" reproduit encore une fois le même principe, mais avec une virulence nouvelle qui élève clairement le livre : on aimera l'auto-dérision évidente (les Inrocks, les t-shirts Joy Division ou Sonic Youth portés par des êtres ignobles qui nous ressemblent...) et l'habileté coutumière du scénario "choral" derrière les courtes caricatures, même si l'on ressortira une fois encore avec un léger sentiment de futilité... Comme si la "bobolanderie" avait gagné la partie de toute façon, mais que tout cela n'ait vraiment aucune importance. Un peu comme pour l'excellent cinéma français d'auteur, ou la (moins excellente) littérature française, on ne peut que déplorer que cette BD-là ne se confronte pas un peu plus courageusement au monde réel (au delà du Canal Saint-Martin !). [Critique écrite en 2008]