Ce quinzième volume de "Billy Bat", que je n'attendais pas forcément après la magnifique conclusion du quatorzième, m'a d'abord frustré, et même déstabilisé : Urasawa m'a donné le sentiment qu'il me tordait le bras pour me faire revenir sur des fils narratifs de sa saga démentielle qu'il n'avait pas encore poursuivi (en gros : qu'est devenu Duvivier après sa chute ? Où est le rouleau, qui en est désormais le détenteur et pour en faire quoi ? Qui était l'étrange apparition entourée de chauve-souris ? Jusqu'où va le talent psychique du jeune Kevin Goodman ?)... mais qui m'allaient plutôt bien comme ça ! Pire encore, avoir évité la catastrophe ultime grâce à un moment de sidération de son principal "méchant" semble désormais un simple argument pour relancer une nouvelle intrigue sur la prochaine "fin du monde potentielle", intrigue centrée cette fois sur la prédiction du "9-11". A ce petit jeu là, "Billy Bat" peut encore durer une bonne dizaine de tomes, et sombrer définitivement dans le grand n'importe quoi que nombre de ses détracteurs l'accuse déjà d'être... Bon, mettons un frein à notre mauvaise humeur pour admettre que, bien sûr, Urasawa sait comment faire pour nous intriguer et nous émouvoir : à ce titre, le passage sur "la vraie vie de Kiyoshi", uchronie idéalisant une vie de mangakan célèbre comme alternative à celle de criminel, est magnifique, en ce qu'il relativise et enrichit à la fois l'histoire que nous venons de lire. De même, retrouver l'attachant Agent Smith (en maison de retraite !) et le répugnant Finney en 1990 est loin d'être inintéressant... Attendons néanmoins le prochain volume pour savoir si "Billy Bat" se relèvera de l'effet-tiroir abusif caractérisant ce quinzième tome, et s'il faut abandonner tout espoir quant à la capacité d'Urasawa de le transformer en sommet de sa longue carrière. [Critique écrite en 2015]