Tout va très vite, dès la première page, le personnage de William Bonney dit Billy, et le décor sont plantés, et même Lucky Luke apparaît en bas de case, c'est donc très fort d'introduire dans un début aussi rapide les 2 personnages principaux qui vont presque tenir à eux deux tout l'album. La confrontation ne tarde pas non plus, Luke est désarmé à son grand étonnement, mais il ne se laisse pas impressionner, et ne tarde pas à se rendre compte que Billy, "le" fameux Billy le Kid est un sale mioche insupportable et caractériel, aux farces douteuses qui n'amusent que lui.
Pendant tout l'album, ça sera donc un jeu d'observation, de défi, de provocation, de jauge entre les 2 protagonistes. Goscinny prend un personnage historique de l'Ouest qui à 21 ans avait déjà tué 21 personnes, et le caricature à l'extrême en le transformant en gamin capricieux qu'il faut dresser, ce que fait Luke par son indifférence envers lui et par les fessées. A noter que Morris en fait un gaucher selon la tradition, alors que Billy le Kid n'était pas gaucher, la confusion venant d'une photo de lui développée à l'envers.
Ce qui est drôle dans cet album, c'est que Goscinny exploite comme il l'a déjà fait dans d'autres épisodes, le côté poule mouillée des habitants de l'Ouest devant un desperado, ce qui génère une quantité importante de gags ; seul Josh Belly, le patron du Clairon, ose braver le bandit (ce personnage ayant la tête de Paul Dupuis, l'un des éditeurs du journal Spirou, mais peu de lecteurs le connaissent). Les exercices de tir sont également montrés par Morris malgré certaines censures à une époque qui interdisaient aux jeunes la vision d'une arme à feu en action. Plus drôle est l'exercice d'adresse de Luke avec le caramel mou page 14.
Il y a aussi dans cet album une image montrant Billy tétant un revolver, elle fut censurée en 1962 et rétablie en 1981 ; cette anecdote est vraie, Morris la relate dans une interview des Cahiers de la Bande Dessinée n°43 en 1980 qui lui était consacré. C'est la censure française qui a supprimé cette image, mais je ne sais pas quand elle a été réintégrée parce que dans l'édition de 1969 que je possède, elle y figure...
Finalement, Luke va arrêter Billy en jouant une comédie bien montée, là aussi, cette idée est bien trouvée, permettant à Morris de faire passer son héros pour un desperado, c'est une idée intéressante. Au final, cet album figure encore parmi les meilleurs de la série, sans Dalton (même si on les aperçoit le temps de 2 cases, ainsi que Jesse James qui plus tard fera lui aussi l'objet d'un album, avec un physique un peu différent), mais avec une étude de caractères très savoureuse. Le personnage de Billy aura selon Goscinny, un potentiel amusant à exploiter puisqu'il sera réutilisé dans l'épisode L'Escorte.