Black Clover
5.8
Black Clover

Manga de Yuki Tabata (2015)

Que ceux tenus à un régime sans sel ne se risquent pas davantage à la lecture de ce qui suit. Oui, elle est salée cette critique, c’est de circonstance alors que j’y déverse mon sel à raison d’une kilotonne par ligne. Un sel pétri de notes acides baignant quant à elles dans une acrimonie bien amère. Passé l’agacement légitime d’un regard critique posé sur l’œuvre, on retrouvera des soupçons prononcés de haine pure et inextinguible ; et pas qu’un peu.


Alors comme ça on n’a pas de pouvoir et on vit dans un monde où tout le monde a des pouvoirs ? Que faire ? Que faire si ce n’est plagier My Hero Academia ? Car, quitte à reprendre et détourner – si mal – un concept puisé dans un manga analogue paru à peine un an avant la parution de Black Clover, autant piocher à pleine pogne dans ce qu’il se fait de pire. Il serait en effet bien dommage de se risquer malencontreusement à la qualité malgré soi en plagiant un Shônen digne d’un regard . Le mal fut ainsi évité sans peine alors qu’un auteur sans scrupule ni talent d’écriture agitait ici son stylo sur ses planches en gardant un œil rivé sur ce que dessinait le voisin. Black Clover, je ne l’avais pas lu que je l’avais déjà noté. Ce manga est porteur de promesses dont on ne souhaite jamais qu’elles se réalisent, et qui adviennent pourtant toujours. Lancez-vous donc dans cette lecture en envisageant le pire du pire ; vous mesurerez alors à que même votre plus sordide élan de pessimisme n’égalera pas – même de loin – ce qu’accomplit la nocuité de l’auteur en chaque occasion qu’il a de dessiner.


Je pourrais lui lâcher la bride au pauvre homme. Figurez-vous qu’il est malade et que la parution s’est interrompue en conséquence. Mais je n’ai jamais rechigné à frapper un homme à terre. Jamais. Un combat singulier contre un tétraplégique ne m’a jamais fait peur et pisser sur la malglorieuse postérité d’un auteur alité encore moins. Je lui souhaite néanmoins de se rétablir. Ne serait-ce que pour mettre fin à la parution de cette énième disgrâce éditoriale que l’on doit encore à la Shueisha.


Du reste, je peux d’autant plus aisément achever ce mourant que ses fans ont déjà bien entamé la procédure, et sans complexe. Le chapitre 329 était paraît-il si légendaire que les fidèles d’hier se sont immédiatement transformés en iconoclastes acharnés.

Je lui reconnais un mérite à Yûki Tabata, c’est celui d’avoir eu l’idée de faire un pot-pourri de My Hero Academia, Harry Potter, Berserk et Seven Deadly Sins dans lequel il s’est allégrement servi. Et toujours pour s’inspirer du pire de ce que chacune de ces œuvres respectives ont à nous offrir, cela va de soi. Que ceux qui ont été émoustillés par la mention de « Berserk » tempèrent leurs ardeurs, var passé la grosse épée du protagoniste principal, la comparaison s’arrête aussitôt.


Des choses, sur le dessin, je pourrais en dire. Mais, plagiat oblige, je ne pourrais rien en dire de nouveau. Qu'ajouter de plus à cette exhibition de poncifs qu'un trait convenu, semblable à mille autres, et évidemment incapable de se démarquer en aucune façon. Il n'est pas de mauvaise qualité : il n'a simplement pas d'âme et ne sera jamais à même de communiquer un sentiment si ce n'est la consternation du lecteur. Le tout, quand on s'attèle à un manga, n'est pas seulement de savoir dessiner, mais de savoir quoi faire du dessin. Yûki Tabata - et tant d'autres de ses confrères - ont, à ce titre, beaucoup à apprendre d'un One.

Difficile de croire, ou même de seulement appréhender qu'Hiro Mashima puisse avoir un rival dans la course à celui qui nous gratifierait du pire en matière de Shônen. Et il s’en est trouvé un. La chose est impressionnante, quoi qu’assez peu réjouissante quand on mesure ce que cela signifie.


Tous les clichés les plus outrecuidants, les plus éculés, ceux-là même que les mangakas contemporains n’osent plus trop utiliser de peur de passer pour des cons, Yûki Tabata nous en dispense treize à la douzaine à chaque chapitre qui vient. Quand un élan de créativité, d’originalité, ou même de qualité se profile sur une de ses planches, la gomme est aussitôt mise à contribution. Je n’aurais jamais cru voir ça un jour, et ça n’est pas un spectacle sur lequel que je souhaitais un jour poser mes yeux mais… ça a fini par arriver : un mangaka a eu, dans son absence d'âme et conscience, l’idée de plagier Fairy Tail.


Me direz-vous « C’est la réponse du berger à la bergère » alors qu’Hiro Mashima ne s’était certainement pas privé de plagier à outrance One Piece jusqu’à s’approprier son style ». Mais tout de même… je ne demanderai même pas si ce plagiat est une bonne ou une mauvaise idée ; je me demanderai simplement s’il s’agit d’une idée tout court. C’est une idée, vraiment, d’ingurgiter un résidu de ce qui a déjà été mâché, digéré et excrété par un autre pour l’imiter dans la disgrâce ? Bon sang, les Black Bulls sont une copie quasi-conforme à la guilde Fairy Tail. Jouez-y donc au jeu des sept différences, vous n'y viendrez pas à bout.


Mais bien sûr que les personnages sont tous d’infâmes clichés de Shônen. Bien sûr ! Ce ne sont d’ailleurs pas des personnages, mais des stéréotypes auxquels on associe des bulles de dialogue. Qu’ils n’aient pas d’âme, c’était entendu avant même qu’ils ne soient portés sur papier. Mais il n’ont ni esprit, ni caractère ni même un quelconque intérêt ; ils sont parfaits d’imperfections. Le pire s’étale et dégouline sur chaque aspect qu’est susceptible de recouvrir le manga, y’a rien à sauver : rien. Du fan service aux ficelles scénaristiques mitées tant elles ont été utilisées ailleurs ; un lecteur ne trouvera pas même un soupçon d’espoir dans la bouillie scripturale qui lui est servie.


Qui plus est, chez Black Clover, les power-up tombent à heure fixe. Avec option démon intérieur, s’il vous plaît. Il n’aurait su en être autrement. L’armurintrigue molletonnée dans laquelle les personnages principaux sont couvés ne présente quant à elle pas la moindre trace égratignure. Il faut dire que la magie se rapportant à la réincarnation aide pour beaucoup. Voudrait-on s’inquiéter pour eux qu’on ne le pourrait pas. Et c’est là où le bât blesse, car les personnages nous sont si étrangers qu’en tant que lecteur, on ne s’en inquiète jamais. Car excepté l’antipathie qu’ils suscitent au naturel, ils ne nous suggèrent rien. Pour un peu, on souhaiterait leur mort et celle de leurs ennemis : que rien ne demeure.


Black Clover, en l'état, est un triste résidu d’inceste que Fairy Tail aurait pu engendrer en copulant furieusement avec Rave ou Eden’s Zero – si ce n’est les deux à la fois, pour ensuite les faire accoucher depuis le fond de l’intestin grêle.

La comparaison avec Naruto ne s’en tient pas au démon renard putatif qui sommeille ici. Non, la propension qu’a eu la Reine des Sorcières à soigner tout le monde après la baston m’aura immanquablement rappelé la résolution de l’arc Pain où tout le monde fut miraculeusement soigné, y compris les morts. Moi qui croyais avoir surmonté le traumatisme…


Le chapitre 329 aura en effet été hilarant. On le sent, c’est palpable, l’auteur n’en a positivement rien à carrer. Il n’y a aucune implication, rien que l’application à la lettre d’une recette dont personne de sain d’esprit ne souhaitera jamais goûter cet immonde plat en espérant s’en régaler. Dieu merci pour monsieur Tabata, il se trouve assez de coprophages en ce bas monde pour faire honneur à sa cuisine.


La critique que j’adresse à Black Clover est presque lapidaire comparée au traité contre le mauvais goût que fut celui chargé de rétribuer Fairy Tail. Je note présentement la copie d’une copie faisant ainsi suite à deux œuvres dont j’ai déjà tout dit. Il n’y a rien à ajouter. Toutes choses considérées, ça se passe de commentaire tant tout cela est honteux. Car à dire vrai, Black Clover est le dernier appendice du centipède humain, celui qui pondra ce que deux autres ont mâché, digéré et péniblement excrété avant lui. Que l’auteur n’ait aucun scrupule – mais alors aucun – ça n’est pas nécessairement agréable à constater, mais qu’il se soit, là encore, trouvé des cohortes de crétins pour le conforter dans ce qui tient lieu de prévarication éditoriale, c’en devient inadmissible au point où ça suggère des mesures de rétorsion. Tel un Grand Inquisiteur, certes zélé, mais on ne peut mieux fondé à écrire le présent réquisitoire, je prononce un jugement sévère qui justifie amplement le bûcher pour ces lecteurs passifs qui entraînent leurs contemporains dans les abîmes de son absence de goût.


À trop révérer de fausses idoles, on retarde l’arrivée du messie. Tant qu’il se trouvera des mammifères (n’insistez pas, je me refuse à considérer de pareils lecteurs comme des êtres humains) pour encenser ce qui doit être immolé, les maisons d’édition privilégieront ce qui se fait de mauvais à commencer par le pire. Car en l’état, il n’y a rien de plus simple à écrire que des œuvres écrites par d’autre, mais en moins bien encore. Nous en sommes arrivés à un stade anthropologique où des lecteurs de Shônens se pourlèchent de contenus qui, sur le plan de l’écriture, ne valent même pas une fanfiction de collégien écrite dans les années 2000. Et ces mêmes spécimens organiques, pour beaucoup, voire la quasi-intégralité d’entre eux, se pâment aussi devant Hunter x Hunter. Mais mes bons amis (c’est une tournure de phrase ; sachez que je vous hais), des auteurs capables de pondre des œuvres de la trempe d’un HxH, vous n’êtes pas prêts d’en voir de nouveau tant que vous resterez enfiévrés devant le fond du fond du fond des chiottes de ce qui peut s’accomplir sur le plan de la création. On ne peut prétendre aimer un plat de chef étoilé quand on croit pouvoir savourer un Happy Meal. L’un sera pourtant toujours objectivement préférable à l’autre, et, eut égard à ce dilemme j’observe que la majorité a fait son choix quant à ses préférences : d’où le mépris dont je la gratifie sans réserve, cette majorité. D’où le 1/10, d’où la haine ardente qui me consumait alors que je mettais encore les pieds dans une nouvelle couche d’abjection présentée comme un Shônen, un de ceux injustement acclamés par une masse pataude et intellectuellement amorphe.


La masse n’a pas de goût, c’est une constante universelle et, parce qu’elle est la masse, les gens de goûts, minoritaires, pâtissent quant à eux du sous-développement critique de leurs semblables. Si vous autres, lecteurs assidus de Black Clover et autres Shônens excrémentiels aviez une once de colonne vertébrale et un système immunitaire cognitif opérant, vous sauriez séparer le bon grain de l’ivraie. De là, le milieu du Shônen – et cela vaut pour tous les milieux artistiques en général – pourrait ainsi connaître un nouvel âge d’or à chaque génération de nouveaux auteurs qui nous parviendraient. De par le seul fait existentiel qui se rapporte à vous, vous empêchez cela. Black Clover est la postérité artistique érigée à la gloire des médiocres qui ne méritent que cela et guère plus. Gardez-vous bien, après avoir osé aimer cette abomination, de seulement toucher à une page de Hunter x Hunter ou aux autres monuments Shônen ; car de ces œuvres, vous en êtes indignes et les saliriez de votre seul regard porté sur elle. Indignes comme peuvent l’être les maris volages qui, après avoir embrassé une pute syphilitique, s’en iraient ensuite poser leurs lèvres sur celles d’une épouse aimante.


Josselin-B
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le 21 janv. 2023

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Josselin Bigaut

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