Isabelle Samain. Un nom qui sonne comme une promesse. Un nom qui va devenir une obsession pour un ado sautant à pieds joints dans le tourbillon de l’amour. Un amour certes à sens unique mais suffisant pour faire de chaque jour un moment de bonheur. Isabelle jouant au tennis, Isabelle sous l’abri de bus, Isabelle au collège, Isabelle à la piscine… L’observer de loin, ne pas oser l’aborder, récupérer une mèche de cheveux, un peigne ou une rognure d’ongle, avoir le cœur brisé en la voyant avec un autre, l’ado vit les affres d’une première histoire d’amour au début des années 80, sans les réseaux sociaux et sans pouvoir faire son éducation sexuelle en abusant du porno gratuit sur le net.
Rabaté adapte en BD le récit (à peu près) autobiographique de l’immense François Morel. C’est drôle, doux, tendre, poétique. Ça dit l’amour balbutiant, les premiers pas maladroits, les rêves fous que l’on sait inaccessibles et auxquels on s’accroche parce que de toute façon il n’y a pas moyen de faire autrement. Bien sûr on idéalise, bien sûr on fantasme, bien sûr on tente d’apprivoiser ses sentiments et ses désirs, les signaux que le corps nous envoie, la meilleure façon de calmer les premiers émois. Et ces interrogations, nombreuses. Sur le sexe, les filles, la façon de s’y prendre, de vaincre sa timidité, de décoder les signaux. Quitte à se tromper et à connaître de marquantes désillusions.
Niveau dessin Rabaté fait du Rabaté avec son trait ample, tout en souplesse, ses couleurs pastel et ses décors souvent réduits au strict minimum pour privilégier la lisibilité. Surtout, il restitue à merveille la sensibilité et la malice du texte de François Morel en replongeant le lecteur au cœur des années Giscard.