"C'est comme ça que je disparais" nous raconte quelques mois dans la vie de Clara, jeune attachée de presse et écrivaine vivant à Montréal. Clara souffre de dépression chronique et cela à forcément des conséquences sur ses relations, sa vie professionnelle (elle doit publier un livre mais n'arrive pas à sortir une phrase) et bien sûr sur son goût à vivre de manière globale.
J'aime beaucoup le trait de Mirion Malle, tremblotant et assez biscornu, presque enfantin. Ce côté brouillonnesque ne plaira pas à tout le monde, mais je trouve qu'il colle parfaitement avec l'histoire racontée, que ce soit pour illustrer les aléas du trouble dépressif en lui même mais aussi l'époque et le milieu social dans lequel vit Clara: une ville occidentale très cosmopolite, une sphère sociale composée de jeunes adultes issus de la culture ""woke"" (je déteste ce mot), artistique et littéraire, vegan-friendly, Biocoop-compatible, LGBT et j'en passe.
La dépression de la protagoniste, cette lassitude extrême qui pose une chape de plomb sur les moindres choses de la vie (sortir avec ses amis, répondre au téléphone, "entretenir" ses relations de manière générale) est vraiment bien décrite. L'image du vase qui déborde pour les crises de larmes intempestives, le sentiment d'être seul, en décalage même entouré de proches, de collègues, car la vie continue sans nous, tout cela est très bien servi par l'illustration et les expressions des visages.
Les réactions de l'entourage à l'isolement progressif de Clara (comme l'a bien décrit la critique précédente) sont réalistes et aucun jugement n'est posé dessus, même quand elles sont in fine contreproductives. Car les personnes dépressives sont parfois hors d'atteinte malgré toute la bonne volonté du monde, et la frustration d'être "de l'autre côté" et de se impuissant face à la dérive, parfois fui et exclu du dialogue, mis de côté, est aussi bien exprimée.
Un seul point vraiment négatif pour moi, je trouve que la façon dont est racontée le twist final (pas la révélation en elle-même (malheureusement banale) mais vraiment le dialogue ) est trop caricaturale: le côté politique/militant prends le dessus et rends le dialogue un peu lourd, trop théâtral, pas assez "réaliste" justement. Spontanément, est-ce qu'on parle comme ça? Je ne sais pas.
M'enfin ça ne m'a pas empêché d'avoir beaucoup apprécié cette BD: j'ai été émue, je me suis un peu reconnue aussi. Et la patte de la dessinatrice me plait. Donc merci Mirion!