Incroyable mais vrai: personne ne veut embaucher Mickey Mouse! Dans l’Amérique des années 30, lui et son copain Horace font la queue tous les matins pour trouver un job, mais bizarrement ils ne correspondent jamais aux profils recherchés. Ce jour-là, Mickey et Horace pensent enfin se faire engager comme mécaniciens, mais l’un est recalé parce qu’il est trop petit et l’autre parce qu’il est trop grand… Cela a beau être la Grande Dépression, c’en est trop pour les deux compères: si ça continue, ils vont péter les plombs! Pour se changer les idées, ils décident d’aller passer quelques jours au bord de la rivière chez leur ami Donald afin d’y faire un peu de camping avec leurs compagnes Minnie et Clarabelle. Ce petit séjour, tout en rires et chansons, leur fait un bien fou. Hélas, à leur retour, ils vont de mauvaise surprise en mauvaise surprise. En plus d’être expropriés par l’infâme Rock Füller, un banquier véreux qui veut raser tout le quartier afin de construire un terrain de golf, ils constatent avec effroi que tous les habitants de la ville se sont transformés en zombies dignes de la série "Walking Dead". Même leur copain Dingo est encore plus cinglé que d’habitude. Lorsque Mickey se rend chez lui, ce brave Dingo n’est plus du tout lui-même: il a les yeux tout rouges et tourne en permanence son moulin à café en répétant le mot "caafééé, caaafééé, caafééé"… Et si l’état inquiétant de Dingo était lié au mystérieux café Zombo qui a été distribué gratuitement aux habitants de la ville? C’est d’autant plus plausible que dans le même temps, tous les hommes ont été embauchés en masse pour travailler sur le chantier de Rock Füller, tandis que les femmes et les enfants ont été envoyés dans un camp de vacances. Intrigués, Mickey et Horace décident de mener leur enquête pour comprendre ce qui se trame.
Après Cosey, Trondheim & Keramidas puis Tebo, c’est au tour du grand Loisel de reprendre le personnage de Mickey. Et on peut dire qu’il s’agit d’un fameux événement puisque c’est la première fois depuis "Peter Pan", dont le sixième et dernier tome est paru en 2004, que Loisel signe un album à lui tout seul, assurant à la fois le scénario, le dessin et les couleurs. Il faut dire que ce projet avait tout pour enthousiasmer Régis Loisel, qui est depuis toujours un fan absolu du dessinateur Floyd Gottfredson, celui-là même qui fut en charge des comic strips de Mickey à partir des années 1930. "C’est un rêve, un acte d’amour. J’ai toujours eu envie de faire ça", répond Loisel quand on lui demande pourquoi il a accepté de reprendre le personnage de Mickey. "Et même si je préfère de loin d’univers de Donald, Mickey est le personnage qui m’intéresse le plus, graphiquement. Mais pas n’importe quel Mickey: celui du début des années 1930, jusqu’à 1935-36 disons. Lui faire retrouver Horace, son compagnon des débuts, c’était aussi pour moi un moyen de retrouver ce noir et blanc et cette rondeur, dans la continuité de Felix le chat, qui habitaient ses premières histoires, où il y avait une espèce de naïveté formidable. Pour être honnête, ça faisait longtemps que je n’avais pas pris un tel plaisir en dessinant." Ce plaisir, les lecteurs le ressentent! Dans chacune des 80 pages de cet album au format à l’italienne, on constate que Loisel s’est amusé comme un gamin, truffant ses cases de petits détails. Il accorde également un grand soin aux décors et aux personnages secondaires, de Pat Hibulaire à Clarabelle en passant par Dingo et Donald. Désirant plus que tout conserver l’énergie propre aux strips de Gottfredson, Loisel multiplie par ailleurs les gags et les scènes d’action, donnant ainsi à ce "Café Zombo" un rythme et une inventivité incroyables. Du coup, on en oublie presque que l’époque dans laquelle se situe cette histoire est particulièrement tristounette, puisqu’on est en plein coeur de la terrible crise économique des années 30. Au final, cela donne un album magnifique et très amusant à lire. Seul bémol: on n’y retrouve ni la magie de "Peter Pan" ni l’émotion de "Magasin général", deux séries mythiques signées Loisel. Mais on ne peut pas tout avoir non plus!
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