En 2016, Disney lance avec Glénat une série de one-shot de Mickey avec de grands noms de la bande-dessinée. La presse est très enthousiaste, mais apparemment moins les lecteurs. Cette série n’aurait pas obtenu le succès espéré. La faute à un sujet de base, Mickey, peu pertinent ? « Café Zombo » permet à Régis Loisel de s’emparer des personnages de Disney. Vu le pédigré de l’auteur, on se demande bien comment il va pouvoir s’en sortir. Le tout paraît dans un format à l’italienne élégant pour 68 pages.
Dans l’Amérique de la dépression, Mickey et Horace cherchent du travail comme ouvrier. Chômage, expulsion des logements… Loisel inscrit son histoire dans le social. Hélas, avec un album de « Mickey », difficile de faire un ouvrage sur le sujet en mêlant action débridée et humour potache (et puéril). On ne va pas se le cacher, la patte de Loisel est inexistante sur ce livre, dans le sens où l’on ne reconnaît pas du tout l’auteur, tant dans le scénario que dans le trait. L’histoire est sans grand intérêt. Il y a quelques idées, mais le tout manque totalement de cohérence. Cependant, « Café Zombo » est parfaitement fidèle à l’esprit de Mickey. En cela, c’est un bel hommage. Mais à destination de qui ? Quand j’avais 10 ans, j’adorais lire Mickey. Mais pour un trentenaire, quel intérêt ? Comme « Mickey’s Craziest Aventures » (par Trondheim et Keramidas), Loisel n’arrive pas à transcender le sujet et se content finalement d’un hommage trop proche de l’original, avec un propos social pour essayer de donner un plus « adulte » à l’ensemble. Mais avait-il seulement le droit de pousser plus loin ? Disney l’aurait-il autorisé ? On atteint la limite du concept : prendre des auteurs avec des univers forts et les cloisonner dans un autre, avec des règles plus strictes.
Alors que dans ses bande-dessinées, Loisel n’a jamais hésité à condamner l’attitude des hommes avec les femmes, on retrouve des scènes misogynes dans l’ouvrage. Bien évidemment, on voit l’idée : c’est la Minnie de l’époque que Loisel représente. Mais en faisant un Mickey en 1930, Loisel s’enfonce d’autant plus dans l’hommage plus que la réécriture d’un personnage.
Au niveau du dessin, c’est très réussi. C’est du pur Mickey. Loisel ne cherche pas à en faire autre chose et travaille surtout le dynamisme des personnages. Encore une fois, c’est un bel hommage, mais au vingt-et-unième siècle, c’est passé. Loisel s’est parfaitement approprié le trait de l’univers Disney, mais sans y apporter réellement sa patte. Comme c’est l’un de mes dessinateurs préférés, je suis un peu amer.
« Café Zombo » est un hommage trop proche de l’original pour être pertinent. Mickey, ce n’est pas la bande-dessinée la plus passionnante du monde et c’est clairement orienté jeunesse. En restant trop proches de l’original, malgré un propos social qui se veut plus adulte, Loisel ne parvient par à transcender le tout. On reste dans l’exercice de style. Et on referme l’ouvrage en se disant que l’on aurait préféré que l’auteur nous fasse une autre BD. Pas sur Mickey.