"Les Vieux Fourneaux / Ceux qui restent" n'était pas forcément le livre le plus attirant publié en 2014 : j'ai d'ailleurs attendu deux ans pour le lire, rebuté par ce qui pouvait sembler au pire une exploitation humoristique du 4ème âge, et au mieux un travail sur la nostalgie (qui n'est plus ce qu'elle était, n'est-ce pas ?). Quelle n'a donc pas été ma suprise de découvrir un excellent scénario aux allures de thriller mémoriel, réservant au lecteur vite conquis son content de "twists", ou au moins de surprises, en outre parfaitement crédibles ! Avec en plus une galerie de personnages hilarants et émouvants à la fois, impeccablement croqués dans leur déraison, leurs obsessions et leurs merveilleuses aspirations à une vie meilleure. Car, cerise sur le gateau, Lupano nous offre - et les gens de ma génération, qui ont connu ces combats et ces emportements, y seront certainement plus sensibles que les plus jeunes qui n'y verront peut être que des délires dépassés - des parti pris politiques et idéologiques (la vieille lutte des classes, bien oubliée, sans doute toujours pertinente, mais aussi l'écologie face au cancer de l'argent tout puissant) qui font plaisir à lire... La diatribe de Sophie contre "notre génération " est ainsi un très grand moment de cette BD qui finit par dynamiter pas mal de nos préjugés, et réussit à nous faire rire de bon coeur sans avoir recours à l'habituel arsenal de gags, et nous émeut profondément sans tomber dans la démagogie. Personnellement, je regretterai deux choses : un graphisme inutilement dynamique, voire même parfois agressif, en contradiction finalement avec la "philosophie" prônée par ces "Vieux Fourneaux", et... le fait qu'il ait fallu donner une suite à si une si belle histoire, parfaitement conclue ici par une scène magnifique, qui semble résumer idéalement les enjeux du livre et laisser en suspension un avenir réjouissant. Oui, à ces deux réserves près, "Ceux qui Restent" est un délice ! [Critique écrite en 2016]