La BD se met à la série... (???)
On a envie d'applaudir le concept de "Cité 14" (la publication mensuelle d'un livret d'une vingtaine de pages pour 1 Euro, la production de chaque année étant réunie en une "saison"), mais force est d'avouer qu'il s'agit d'une bonne idée de marketing plutôt que d'un défi "formel" : la lecture des douze livrets à la suite s'apparente tout-à-fait à celle d'un récit classique et on ne sent pas vraiment ce que le concept a pu apporter à la construction du récit... Finalement, ce qui "feuilletonne" le mieux dans "Cité 14", c'est l'aspect littéralement foisonnant des personnages et des situations, très proche, là oui, de ce à quoi la télévision américaine nous a habitué depuis une dizaine d'années (... d'où bien entendu le choix d'intituler ce premier volume "Saison 1" !). Sur ce point, force est de tirer son chapeau à Pierre Gabus, qui a su inventer un monde vraiment original (mélange d'humains, d'animaux et d'extra-terrestres), à la fois rétro (le New York du début du XXe siècle) et futuriste, tout-à-fait décalé et pourtant superbement familier (idée brillante de toujours ramener, derrière l'action débridée, les problèmes sentimentaux des personnages !), et qui a surtout réussi à nouer et dénouer tous les fils de sa fiction avec habileté, sans que pourtant son univers perde en profondeur et en mystère. Dommage finalement que le dessin, soigné mais peu enthousiasmant, tire le récit vers le bas : on peut aimer le côté cheap du Noir & Blanc et de l'impression (pour 1 Euro !), mais la force de la narration aurait mérité un plus beau support. [Critique écrite en 2008]