Contre ma conscience
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Contre ma conscience

Roman graphique de Hannah Brinkmann (2022)

être pacifiste en allemagne nazie d'après-guerre

En 1956, le nazi chrétien démocrate Konrad Adenauer et sa coalition restaurent le service militaire obligatoire pour les garçons. Pour y couper, il faut vivre à Berlin, obtenir une exemption médicale, ou passer devant une commission qui n'acceptera comme arguments valables que ceux qui invoquent la religion chrétienne.

Hannah Brinkmann a écrit cette bande dessinée pour rendre hommage à son oncle Hermann, qui a préféré se suicider à 19 ans plutôt que porter les armes qu'il avait toute sa vie refusé de toucher.

La bande dessinée se base sur les témoignages des survivants de sa fratrie pour relater les mois qui ont précédé sa mort en 1974. Le frère cynique qui lui conseille de déménager à Berlin (exemption automatique pour les résidents de la capitale), celui qui lui propose de partir dans la clandestinité, la soeur révoltée qui l'encourage à ne pas transiger - et hélas à jouer sans tricher le jeu d'un système biaisé pour baiser les gens intègres.

L'armée va même utiliser une loi nazie de 1935 ("loi relative au conseil juridique, ayant eu pour conséquence de saper l'existence des juristes juifs") pour déposer des plaintes contre 88 personnes ayant conseillé aux appelés d'opter pour le service civil (même si plus de la moitié des demandes échouaient).

Le récit restitue la sensation d'enfermement dans un engrenage, simplement en montrant des conversations entre frères et soeurs - et la reconstitution partielle du passage devant la commission kafkaienne qui lui refusa le statut d'objecteur.

Sans être réaliste, le dessin est suffisamment détaillé pour rendre le contexte de ces intérieurs rangés où s'opposent les trophées de chasse occupant tout un mur du séjour, et les images de plantes et d'animaux dans la chambre d'Hermann.

Des couleurs délavées évoquant un monde terne, uniforme et passablement sinistre, comme les visages, laids.

Une scène à l'église et une en salle de classe rappellent le conformisme réactionnaire de la société où grandissaient les baby boomers révoltés, et l'obsession anti-communiste qui a justifié le retour de la conscription. D'autres scènes, et des inserts, se rapportent au goût du défunt pour la nature ; certaines illustrent ses hantises et donnent un aspect cauchemardesque à ces/des formes organiques.

La construction du récit m'a rendu nécessaire une seconde lecture pour identifier les membres de la fratrie et comprendre le flash forward initial. Il vaut mieux en savoir un minimum sur les circonstances du suicide par électrocution pour ne pas être perdu dès le début.

Je me demande quel aurait été le résultat si au lieu d'invoquer l'antimilitarisme, on expliquait que le premier qui nous donnerait un ordre après nous avoir mis une arme dans les mains se prendrait une balle dans le caisson.

Just wonderin'...

ChatonMarmot
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le 21 sept. 2023

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ChatonMarmot

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