De novembre 2016 à juin 2017, l’astronaute français Thomas Pesquet a passé près de 200 jours à bord de la Station spatiale internationale (ISS). Doué pour les sciences mais aussi pour la communication, ce beau gosse de 38 ans a redonné le goût de l’espace à de nombreux jeunes (et moins jeunes) en postant de magnifiques photos et vidéos sur les réseaux sociaux et en parlant avec passion de sa mission spatiale. Ça, c’est pour la partie visible de l’iceberg (ou de la lune). La partie cachée, souvent nettement moins glamour, est racontée avec talent et humour par Marion Montaigne dans la BD "Dans la combi de Thomas Pesquet". Car en réalité, avant de pouvoir réaliser son rêve de gosse, le jeune homme originaire de Normandie a dû réussir un incroyable parcours du combattant. Première étape: l’impitoyable sélection des candidats. A la base, plus de 8.400 personnes avaient répondu à l’appel à candidatures lancé par l’ESA, l’agence spatiale européenne, en 2008. Mais à l’issue de tests scientifiques, psychologiques et physiques particulièrement éprouvants (voire sadiques parfois), seuls 6 d’entre eux ont finalement été retenus en mai 2009, parmi lesquels Thomas Pesquet. Deuxième étape: une très longue période de formation. Au total, l’astronaute français se sera entraîné pendant 7 ans, principalement au centre de la NASA à Houston et à la Cité des étoiles à Moscou, avant d’enfin être envoyé dans l’espace. Une formation très intense, qui n’a fait que renforcer la détermination de Thomas Pesquet, mais qui n’a pas toujours été facile à vivre pour lui, notamment parce que les 5 autres astronautes européens sont partis dans l’espace avant lui et qu’il a eu très peu l’occasion de voir sa famille durant cette période. Troisième étape: le départ de Baïkonour et l’arrivée dans l’ISS. Là aussi, Marion Montaigne nous raconte tout dans le moindre détail. Pas seulement les prestigieuses sorties dans l’espace, qui sont souvent les moments les plus médiatisés, mais aussi l’envers du décor et la vie quotidienne dans la station spatiale. Un reportage aussi drôle que passionnant… à mille lieues de "Gravity"!
Surfant sur l’énorme popularité de Thomas Pesquet, la BD de Marion Montaigne connaît depuis sa sortie un formidable succès de librairie. Selon un article du "Parisien", le livre "Dans la combi de Thomas Pesquet" a été l’un des cadeaux de Noël les plus offerts en France cette année puisqu’il a déjà fait l’objet de quatre réimpressions pour atteindre un tirage de plus de 170.000 exemplaires. A la lecture de cette BD reportage faite de 200 pages d’une grande densité, on peut dire que ce succès est mérité. Marion Montaigne, dont on connaissait déjà le talent pour la vulgarisation scientifique grâce au blog et au dessin animé "Tu mourras moins bête", parvient à raconter l’aventure spatiale de Thomas Pesquet de manière à la fois précise et décalée, en n’évitant aucun tabou et en maniant l’humour avec finesse et intelligence. Marion Montaigne a un ton bien à elle. L’autrice se moque gentiment de la vénération des Russes pour Youri Gagarine, par exemple, qu’elle utilise comme une sorte de "running gag". Elle consacre également plusieurs pages de sa BD au mode d’emploi des toilettes dans la Station spatiale internationale et à la formation que les astronautes doivent suivre pour parvenir à viser la (petite) lunette des toilettes en l’absence de gravité. Cela tombe bien qu’elle parle de ça, puisque c’est l’une des questions les plus fréquemment posées à Thomas Pesquet lorsqu’il rencontre des écoliers! Mais le principal point fort de cette bande dessinée réside dans le fait que derrière l’humour, il y a un véritable propos. Tout comme l’astronaute normand, avec lequel elle a évidemment collaboré de manière très étroite, Marion Montaigne parvient à nous passionner pour la recherche spatiale et pour le destin hors norme de ces hommes et femmes qui sont prêts à tous les sacrifices pour aller dans l’espace. Un reportage cinq étoiles.
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