Rien que résumer l'histoire permet de comprendre les multiples positions que prend la nouvelle BD de **Robin Cousin*. Elle suit les mésaventures de 5 personnages dans un futur proche, un monde proche de sa fin :
- Antimaadmi, chef d'une secte qui prône la non-utilisation de ressource, dont les adeptes soulèvent des poids pour fabriquer l'énergie, selon ce que leur dit leur gourou qui intercepte des messages de Gamma Cephei, une planète lointaine.
- Benjamin Eberhardt, blogueur sur la collapsologie (qui parle de l'effondrement de notre société actuelle) a tendance complotiste, fraîchement veuf, qui veut faire profiter ses filles du peu de temps qui leur reste
- Elaine Leong directrice des affaires spatiales à l'ONU
- Simon, et son collègue Bruno qui bossent dans un conservatoire biologique -des simulateurs de nature pour accueillir faune et flore menacées- et qui doivent faire entrer plus d'animaux, avec moins de budget
- Et Cécilia Bressler, sa femme, qui travaille à l'ESA (agence spatiale européenne) et qui vient de trouver de une vie intelligente sur Gamma Cephei.
Tout cela laisse déjà anticiper de tout ce qui peut se passer. Bien sûr, les différents personnages vont se rencontrer, se confronter, ici sera traité de petites relations, et non un grand passage où tout le monde se croise (si ce n'est, au début de l'histoire, un débat télévisé).
Le grand intérêt de cette BD est de voir comment à partir d'un but identique pour chacun -à savoir sauver l'humanité de la grande catastrophe (encore faut-il voir quelle est la catastrophe selon les individus), comment chacun va préconiser une solution différente, et qui est incompatible avec la solution de l'autre. Chacun va y mettre du sien, et -petit spoil, mais vous pouvez vous en douter- personne ne gagnera.
Robin Cousin nous présente donc un monde voué à disparaître, car personne n'arrive à préserver une terre déjà en état de décomposition. Ici on parle d’effondrement écologique et sociétal, d'une crainte de l'envahisseur, d'un monde où on doit "choisir" qui sauver. Une société pleine de contrainte (l'eau courante n'est plus potable), mais dont les puissants se permettent des privilèges mal venus (comme le patron de l'ESA qui se prend un homard au lieu d'insecte -alors que c'est censé être interdit- tout simplement car "les insectes, il peut pas").
Dernier petit mot concernant l'aspect visuel. Le dessin a beau être simplifié, il est embelli par un champ de la couleur très réduit (par exemple, teinte de bleu et de rouge), qui s'alterne au fur et à mesure des séquence, ce qui donne un résultat sympathique à voir.
Des milliards de miroirs est donc une oeuvre à l'apparence réaliste, qui se lit d'une traite, et qui devrait questionner le lecteur pour la suite des années à venir. Mais -comme il le montre en annonçant un désastre inévitable- Robin Cousin est très pessimiste sur notre avenir, non pas par une incapacité des terriens, mais plutôt par une inaction générale, ce qui fait un parallèle évident avec les événements récents.