Il fallait saluer l'entreprise : adapter le Contrat Social de Rousseau en version manga. Le défi était énorme : comment transformer l'essai de philosophie politique en histoire dessinée ? Comment rendre accessible l'exposé théorique rousseauiste et, en somme, le vulgariser ? La promesse de cette adaptation manga était alléchante, et aurait pu illustrer des principes de droit politique qui, parfois, semblent trop abstraits. Du Contrat Social est une œuvre impressionnante dans sa forme et dans sa complexité, et toute tentative de la rendre accessible au commun des mortels est la bienvenue.
Hélas, l'adaptation en manga fait perdre au Contrat Social sa rigueur théorique, l'enchaînement logique de ses propositions et la subtilité de ses démonstrations. La reformulation est parfois même hasardeuse : du français au japonais, puis du japonais au français... La langue a été tourmentée et ça se ressent dans la clarté globale. L'entreprise de vulgarisation semble s'être empêtrée dans la difficulté de la démarche : les explications sont peu claires ; le lecteur patauge dans la confusion entre les éléments qui relèvent du Contrat Social de Rousseau, ceux qui servent le scénario du manga, ceux qui s'apparentent davantage à des commentaires de l'auteur... En somme, la vulgarisation est un échec, car on peine à accéder à la « la substantifique moelle » du Contrat Social. Qu'on lise ce manga en complément de Rousseau, pourquoi pas, mais il semble difficile d'en attendre autre chose.