Je l'ai su tout de suite. Comme un coup de foudre, au premier regard, ça s'est fait immédiatement. Mais... littéral le coup de foudre. Frappé et laissé pour mort. Parce qu'il y a de quoi en crever. À compter de l'instant où j'ai vu ces deux premiers visages au détour d'une planche, le doute n'était plus permis. Je pouvais pas même faire semblant : je savais que ça serait exécrable.
Un dessin ! Rien qu'un dessin. Je n'avais lu aucun résumé, on ne m'en avait jamais parlé, mais le dessin seulement, ça racontait une histoire. Une sale histoire (Ayako). Une qui s'harmonise avec ce trait si spécifique.
Entamer une critique d'Elfen Lied ou de n'importe laquelle ces autres abjections édulcorées interchangeables, c'est pareil à la première instance de Nuremberg.... on ne sait juste pas par où commencer. Le début ? Mais quel début ? Ça commence avant même d'avoir débuté. RIEN-QUE-LE-DESSIN.
Alors ce sera dans le dessin qu'ira se loger la première cartouche. Le dessin... rien que d'écrire «Le» me gêne. Parce que «Le», c'est un pronom personnel. Mais y'a rien plus impersonnel que des traits aussi sinistrement brossés par un auteur dont je devine rien qu'au trait qu'elle est une femme [en fait non, c'est un homme avec un nom de femme, perdu]. Ses personnages... ils n'ont pas de visage, à la place, c'est rien que des yeux dont on doit mesurer l'envergure en 27 pouces, des pupilles humides qui me laissent les yeux secs. Le regard, on dit de lui que c'est le miroir de l'âme. Y'a pas de regard, y'a pas d'âme. C'est la mort qui se dessine avec des contours de lolitas cruches. Rien moins que ça. Une silhouette gracile, pas une once de détail ou de nuance dans les tons ; un style offensant rien que par son existence tant il est dépourvu de la moindre identité. Ce dessin ? Je l'ai déjà vu mille fois ailleurs sans jamais avoir voulu le regarder. C'est une disgrâce, le symptôme premier d'un mal profond, celui qui atteste d'un manque de goût rédhibitoire. Alors oui, rien qu'au dessin je peux le dire : ça va être mauvais. Et ça a beau s'améliorer par la suite, on ne fait que garnir d'infimes détails des concepts vides.
Pensez donc que je l'ai vue la proximité avec Akame ga kill ou encore Sword Art Online. Autant dire un prélude au mauvais. Mais pas le mauvais qui irrite par sa paresse ; le mauvais qui consterne par son inexistence articulée. Elfen Lied, c'est rien moins que le retour du format maïs conceptualisé lors de ma critique d'Akame ga kill. Et depuis le temps, le maïs a tourné. Je ne puis même pas prétendre que ce qui s'offre à moins est faisandé car cela aurait supposé qu'il y ait au moins du goût.
J'ai quand même ri au détour de ma lecture. Mais d'un rire franc et spontané que je me suis empressé de contenir pour ne pas qu'il ne vire au ricanement strident et maléfique. De quoi me faire pleurer de rire jusqu'à me déshydrater. C'était drôle à ce point, oui.
Pas les gags, non. Eux sont affligeants et dépourvus de toute once de spontanéité ou d'originalité ; à la mesure du reste donc. Non, là où j'ai manqué de m'étrangler de rire, c'est quand... je ne sais même plus son nom... mais les dessins - JE VOUS AI PARLÉ DES DESSINS, NON ?! - font qu'ils se ressemblent tous. Et cette secrétaire que nous appellerons... que nous n'appellerons pas en fait, elle aura, le plus calmement du monde, déclamé qu'elle espérait devenir un jour la meilleure secrétaire du Japon. C'est même pas censé être une blague, et c'est encore ce qui rend le tout tordant. Qui, en ce bas monde a si peu d'ambition pour avoir comme rêve de devenir la meilleure secrétaire de son pays ?
Une histoire de monstre de puissance en laboratoire souterrain qui s'échappe et perd la mémoire.... mais où Lynn Okamoto a été chercher un scénario pareil ? Quelque chose me dit que, où que ce fut, il devait y avoir un sac plastique noir attaché par une ficelle rouge autour. Parce que ce qui est alors servi, ça n'est pas de première main. À l'odeur je peux le dire. Au dessin aussi. Mais on va dire que je m'acharne.
Et ce cobaye de laboratoire, elle a des oreilles de chat. Important ça, les oreilles de chat. Ça situe le panorama. C'est inouï, c'est inédit, c'est... inepte au possible. Le point mort de l'imagination ; si on veut faire avancer le bousin à ce stade, faut pousser derrière, sinon ça bouge pas. Mais alors pas d'un iota.
À l'issue du premier chapitre, le lecteur se devait d'être surpris. Elf devait avoir le même visage que Kirasagi ce qui, dans le principe, devait être déroutant. Seulement.... ce dessin... dont j'ai beaucoup parlé mais sur lequel je n'ai pas dit suffisamment, il est si abominable que je suis incapable de distinguer le visage de deux personnages. J'essaye pourtant ! On pourra pas dire que j'y ai mis de la mauvaise volonté mais... rien à faire. Il s'en faudrait de peu. Un grain de beauté, une boucle d'oreille, un accessoire quelconque pour distinguer deux gueules parfaitement identiques. Mais en demander peu à Lynn Okamoto, c'est déjà la pousser dans ses retranchements. Le principe de l'effort chez elle - je le mesure à force de m'inflige le «« scénario»» - est un concept étranger. Lointain même. Apparemment inabordable en ce qui la concerne.
Tout est si sirupeux à la lecture qu'on a les yeux qui collent, englués dans une pâte sucrée mais écœurante dont est faite l'œuvre entière. C'est à la mesure de ce que l'on peut en attendre. Et le drame, c'est que l'on en attend rien.
Parfois, elle est très gentille. Et d'autres fois non. Robert louis Stevenson, allez vous coucher, Lynn Okamoto vous surpasse et vous supplante. Et le tout, avec des dessins en prime. Je pourrais en dire des choses sur ce dessin, mais c'est en choisissant de taire ce que j'ai à rapporter que je me montre le plus éloquent à son endroit. Je pourrais écrire mille fois que c'est de la merde, vous montrer la photo d'un étron et une planche de Elfen Lied pour vous demander lequel des deux est sorti d'un système digestif et l'autre du bot d'une plume, mais ça n'en vaut pas la peine. C'est mauvais à ce point et plus encore.
J'ai pour principe d'insister assez peu sur le dessin quand ce dernier est de mauvaise facture n'ayant pas moi-même les assises pour critiquer. Mais la jurisprudence s'impose quand l'excès de médiocrité en est trop flagrant.
Elfen Lied, Eichi et y vomit (oui je m'essaye aux jeux de mots pour détendre mes nerfs). Les quiproquos sexuels vus un trillard de fois, les postures suggestives, tout y passe. Le cahier des charges de la daube intégrale coche ses cases une à une alors que défilent les pages.
Y'a des fions, des nichons et du sang (Gantz), ça devrait en principe contenter un honnête homme. Eh bien même ça c'est loupé. Même le graveleux, même le racoleur, rien ne prend.
Des trucs mignons en retour - ou supposés comme tels - y'en a une chiée là aussi. Mais pas une idée originale. Pas-une. Y'a rien à soi. Elfen Lied, c'est un peu de tout, mais d'un tout qu'on puise à partir du rien. Pas à partir DE rien, mais DU rien.
Vous voulez que je parle de la personnalité des personnages ? Vous avez des ces lubies franchement. À ce stade de la critique, vous devriez savoir à quoi vous en tenir pour ce qui est de chaque composant d'Elfen Lied. Eh bien soit, parlons de la personnalité des personnages.
Voilà. Je pense ne rien avoir omis. Et j'ai même formulé les choses poliment. Chose admirable lorsque l'on sait avec quel matériau salissant je travaillais alors.
Bon, je l'ai compris sans trop avoir eu à plisser des yeux, ce que je lis, c'est un harem glorifié avec des effusions de sang dont on pourrait croire qu'elles seraient issues de règles abondantes et ininterrompues. Y'en a qui aiment. C'est leur problème après tout. Moi je constate, je soigne pas.
Y'a des œuvres qui vous font relativiser la médiocrité d'un Hiro Mashima. Si Elfen Lied avait un mérite, ce serait celui-ci. Celui du contraste qui s'opère entre la peste et le choléra. Cela, à supposer que la peste soit foutrement mal dessinée. Parce qu'on pourrait en parler du dessin. Mais Caps Lock ne suffirait pas à justement retranscrire mon ressenti à son propos. J'y renonce à regret.
Vous la connaissez l'astuce du «mais en fait, je n'étais pas mort» ? Si tel n'est pas le cas, votre dépucelage promet d'être violent. Chaque fois qu'un personnage est ici laissé pour mort, il réapparaît. C'est une constante, une valeur sûre ; une variable incontestable. Et plusieurs fois en plus ! Y'a pas même l'excuse des Dragon Balls. Une ogive nucléaire tactique peut leur tomber sur le coin du museau, trois chapitres plus tard, les voilà qui sortent d'un bosquet en compagnie de Marcel Béliveau. Et là encore, ça ne se veut pas une parodie délibérée ; ça l'est à son corps défendant. Me demanderait-on de caricaturer Elfen Lied que je n'y parviendrais pas : le travail a déjà été fait à partir du matériau d'origine.
On peut proclamer Elfen Lied comme inattaquable au même titre qu'on peut dire d'un pendu qu'il est capable de résister à la torture. Ça a l'air méritoire dans l'intitulé, mais en fait... pas tant que ça. Pas du tout même. Tout est pourri jusque dans le concept. On suit les aventures d'une fausse couche qui se désagrège, c'est pas agréable à voir. Et je dis pas ça seulement à cause du dessin.
Il n'y a ni histoire, ni motivation ni même un objectif vaguement défini chez qui que ce soit. Les choses se font... parce que. Et il faut s'en contenter. Il le faut sinon Lynn Okamoto va se risquer à l'écriture et, ce faisant, risquerait de se blesser. L'entreprise, pour elle, est périlleuse. Pour nous plus encore puisque nous serions alors les cobayes d'une expérimentation scripturale à l'issue pour le moins incertaine.
Rien n'est appréciable. Même avec des critères de sélection très nettement revus à la baisse, Elfen Lied, ça ne passe pas les tests. Qu'un éditeur, sans qu'on le menace d'une arme, ait pu un jour publier ça reste pour moi inqualifiable. J'y tiens à ma vie, j'y tiens énormément. Mais même avec un canon scié sous les molaires... j'aurais refusé. Il en va de la dignité humaine. Imaginez qu'un gosse tombe là-dessus et tombe nez-à-nez avec les dessins. C'est un coup à ce qu'il s'arrache les yeux pour ne plus avoir à souffrir de la cornée.
Et le dessin - sur lequel j'ai très peu insisté - c'est la vitrine de ce qui se trouve en étalage. Le fond, ici, s'harmonise à merveille à la forme. Alors oui, on peut redouter une lecture d'Elfen Lied. On le peut et même, on le doit.
Larmoyant, cucul la praline, stupide, avec du dramatisme en peau de lapin et qui se pique en plus d'une morale... vraiment, rien ne nous sera épargné à la lecture. Laisser la thématique du racisme entre les mains d'anti-racistes gnangnans, ça revient ni plus ni moins qu'à laisser un bocal de nitroglycérine entre les mains d'un épileptique. Quand on ne sait pas penser, on s'abstient de toute entreprise de réflexion. Réfléchir, Lynn Okamoto, même devant un miroir je suis pas sûr qu'elle y parvienne.
Tout est convenu et revenu ; l'intégralité du répertoire de ce qui se sera fait de plus cliché dans le registre de la fiction a été ici mis bout à bout, du laboratoire clandestin d'où s'échappe une expérimentation jusqu'au happy end. On pourra pas dire que l'auteur se soit égaré à un seul instant puisque le parcours était fléché avant même que la série ne voit le jour.
Difficile de conclure sur un contenu médiocre. Et pourtant, c'est pas faute de m'être essayé à l'exercice. On a eu beau insister toute une argumentation durant pour rapporter à quel point l'affaire était désastreuse, rajouter un «c'est de la merde» ne changera pas la donne. Toutefois, un regard critique m'enjoint à devoir reconnaître qu'un coup d'œil, même sommairement esquissé le long de la quatrième de couverture suffit à nous prémunir de la lecture d'Elfen Lied. Quand votre instinct se rappelle à vous, il est bon de l'écouter. Le mien ? Il aura fallu que je le boxe à chaque page que je lisais pour qu'il s'arrête de grogner.