Le métissage en douceur

Depuis que son petit ami l’a larguée, Coralie n’a plus vraiment la pêche: son appartement est en désordre total, elle n’a plus envie de sortir de peur de retomber sur son ex, et le simple coup de fil qu’elle doit passer pour prendre rendez-vous avec sa gynécologue se transforme en épreuve insurmontable. Petit à petit pourtant, la jeune femme franco-asiatique va se rendre compte que ce n’est pas si mal que ça d’être à nouveau (momentanément) célibataire. Grâce à son frère Thibault, avec qui elle passe de longues heures à jouer aux jeux vidéo, mais aussi grâce à ses collègues et surtout ses nouveaux amis rencontrés au cours de capoeira, une danse brésilienne, elle se reconstruit progressivement une vie sociale qui lui permet de retrouver confiance en elle. Mieux même: elle va rapidement se retrouver à avoir le luxe de choisir entre plusieurs petits amis potentiels. Dans le même temps, Coralie se lance dans des discussions de plus en plus profondes avec Kamel, un ami franco-algérien qui lui demande de l’accompagner en Algérie pour retrouver ses racines et sa famille. De quoi amener la jeune femme à se questionner elle-même sur ses origines laotiennes, mais aussi sur le sens de certains de ses rêves…

Elle est forte, Vanyda. Sans avoir l’air d’y toucher, elle parvient à chaque fois à aborder avec justesse des sujets très complexes. Après avoir évoqué l’adolescence dans « Celle que… » puis l’amour dans « Un petit goût de noisette », l’auteure de BD franco-laotienne parle de double culture et de quête identitaire dans son nouveau roman graphique « Entre ici et ailleurs », qui vient de sortir en librairie. Le sujet est évidemment on ne peut plus actuel: depuis quelques mois, plus moyen d’écouter les infos à la radio ou la TV sans entendre des débats interminables autour des défis liés à l’immigration. Vanyda, elle, se tient bien à l’écart de toute polémique ou considération politicienne sur la question. Son truc à elle, c’est d’aborder les sujets par le biais de tranches de vie à la fois simples et justes, en collant au plus près de la réalité d’aujourd’hui. Une fois de plus, elle opère donc tout en douceur pour montrer le cheminement identitaire de Coralie, qui est Franco-Laotienne comme elle, et de Kamel, qui est Franco-Algérien. Ces deux personnages ressentent tous deux le besoin d’explorer leurs origines pour comprendre qui ils sont réellement. Pas question de grandes démonstrations ni de grands discours pour autant, puisque leur quête identitaire s’intègre dans un récit contemporain léger et sans prise de tête, à l’image des BD précédentes de Vanyda. L’histoire de Coralie est d’ailleurs très proche du vécu réel de l’auteure. « De toutes mes BD, je pense que c’est la plus auto-fictionnesque », reconnaît-elle sur son site. « Je me suis toujours inspirée de mon vécu ainsi que de celui de mon entourage pour faire mes BD, mais dans celle-ci, l’héroïne Coralie est métisse franco-laotienne et fait de la capoeira, ce qui fait quand même un contexte extrêmement proche du mien! Heureusement, elle n’est pas dessinatrice de BD! »

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