Envoyé par sa compagnie étudier la faisabilité d’une extraction de pétrole au large de la Norvège, Ethan le parisien se retrouve sur les îles Lofoten, près du cercle polaire. Sur place il découvre un univers sauvage et préservé, à mille lieux du fourmillement, du bruit et de la folie de la vie urbaine. Au contact de la population locale, il comprend à quel point le projet qui l’a amené là risque de profondément modifier l’écosystème et briser l’harmonie d’un des derniers paradis terrestres. Sa mission arrivant à son terme, le jeune homme n’est pas certain de vouloir retrouver la civilisation, il prend conscience qu’un changement de vie est possible, il suffit de le vouloir…
Pour Ethan, c’est une géographie intime qui se bouleverse. L’acclimatation tourne à la fascination, l’objet de sa mission devient secondaire par rapport à la découverte d’un environnement et d’une population dont le rapport au monde s’imprègne d’une vision profondément respectueuse de la nature, de son rythme et de ses richesses. Sans naïveté ni angélisme, en mettant en perspective les différents points de vue, Ethan se remet en question et s’ouvre des perspectives jusqu’alors insoupçonnables.
Un album engagé, inspiré par la vie et l’œuvre du philosophe Arne Naess, fondateur du mouvement de l’écologie profonde. Il y est question de décroissance, de progrès au service de la société de consommation, d’un rejet de la modernité qui ne nie pas pour autant les bienfaits de la technologie. Ni jargon ni discours lourdement politique mais plutôt un voyage intérieur conjuguant moments contemplatifs et bienveillance à l’égard des insulaires.
Les aquarelles de Laurent Bonneau retranscrivent à merveille les silences et la beauté crépusculaire de paysages imposant leur force tranquille et leur sérénité à l’homme. Le rythme est lent, il ne se passe pas grand-chose mais le charme opère. C’est une lecture que j’ai trouvée apaisante, d’où se dégage une certaine forme de poésie. J’ai apprécié cette façon intelligente de pousser la réflexion en laissant une place à la contradiction, autrement dit sans vouloir à tout prix imposer un point de vue que l’on estime indiscutable.