J'étais intrigué par cette BD. J'aime ce qui touche au milieu porno. J'aime le porno aussi, c'est vrai. mais j'aime bien en apprendre plus sur cet univers. Peut-être parce que la plupart du temps les gens se contentent de dire que c'est mal ou bien que c'est sordide. Et je suis du genre à penser que rien n'est totalement noir, que la vie est pleine de nuances et surtout qu'il y a des gens qui font du porno et qui sont heureux.


L'intrigue est un peu courte, je suis personnellement resté sur ma faim. Mais j'ai vite su que j'allais être sous-alimenté avec cette BD quand, arrivé à la page 40 il ne s'était toujours rien passé de concret et qu'il ne restait même pas 100 pages... La direction m'a un peu surpris aussi : avec un pitch aussi racoleur, forcément, je m'attendais à ce que ça soit un peu plus hot. Ce qu'il se passe n'est pas pour autant inintéressant, que du contraire : on suit les acteurs dans leur quotidien. Les portraits dressés sont passionnants : à la fois immatures et capables de dire des choses intelligentes, voire de citer des films que l'on imaginerait réservés à une élite intellectuelle. Malheureusement, ces 3-4 jours de tournage restent insuffisant pour nourri proprement l'histoire, pour gratter la couche et approfondir ces rencontres. C'est intéressant, oui, mais on en arrive à la conclusion finale qu'on en aurait voulu plus.


C'est intéressant à lire parce qu'il y a de belles situations qui sont bien exploitées. Et puis le personnage principal vit des conflits (dommage que ceux du début soit si vite expédiés, à savoir en parler à la copine, à l'éditeur, aux parents), comme celui de faire l'acteur correctement, de vaincre sa timidité pour débiter son texte de manière convaincante. Cela ne prend pas beaucoup de place (et heureusement sinon on aurait eu moins de temps à consacrer aux acteurs alors que ce n'est pas ce qui intéresse le plus) mais ça suffit à créer des enjeux, à faire monter la tension. On a aussi un objectif principal qui permet de structurer le récit (en ces 3-4 jours). Il est juste dommage d'avoir lancé le récit sous forme de flashback : cet effet de style est complètement inutile (on a compris au vu de la couverture de quoi ça allait traiter, pas besoin d'utiliser un tel artifice) et nuit même au rythme des premières pages.


Le dessin m'a laissé mitigé. D'un côté je trouve qu'il y a beaucoup de dessins qui manquent de grâce, que les personnages sont peu intéressants visuellement, que les compo ne marquent pas vraiment et d'un autre j'ai apprécié le découpage (quelques très bonnes idées), j'ai apprécié les expressions faciales et certaines positions de corps, on trouve aussi des petits détails qui font 'vrai' et qui sont donc les bienvenus.. Les aquarelles sont sympathiques mais parfois je regrette que l'ambiance ne soit pas un poil plus travaillée.


Bref, v'là une 'tite BD sympa à lire.


J'ai envie de parler un peu plus du monde du porno. Je n'ai pas vu beaucoup de docu dessus, en tous cas pas beaucoup de docu nuancés. Mais de ce que j'ai vu, j'ai pu me rendre compte que des tournages pouvaient très bien se dérouler. Et que des actrices pouvaient réussir à mener une belle carrière. Et que donc tout ne se résume pas à des femmes exploitées contre leur gré pour devenir des objets sexuels.


Déjà, je remarque que dans beaucoup de porno, les femmes ne sont pas juste des objets sexuels. Il y est même souvent question de les mettre en avant, notamment en abordant leur jouissance. N'oublions pas que Deepthroat parle avant tout de l'orgasme féminin. Cela reste un fantasme très masculin, évidemment, n'empêche que ça parle plus de la jouissance de la femme que de celle de l'homme. Et il en va ainsi dans beaucoup de porno. Et je trouve même que les femmes ont des rôles plus variés dans le porno que dans le cinéma normal : depuis la p'tite ménagère soumise à la chef d'entreprise dominatrice, en passant par les nymphomanes extraverties, les écolières prudes, les policières corrompues, les masseuses qui rêvent d'avoir ce qu'elles n'ont pas chez elles. Les mecs ne sont pas oubliés mais je les trouve souvent moins valorisés. C'est peut-être le genre de porno que je regarde qui fait ça. Mais cela signifie tout de même qu'il existe un paquet de vidéos où l'image de la femme n'est pas dégradée.


Evidemment, il y a une certaine simplification. Mais cela reste un outil narratif : même dans les films sociaux les plus réalistes, les personnages sont réduits à quelques traits de caractère. Si la Rosetta des frères Dardennes devait prendre vie, elle serait tout bonnement insupportable. Dan sle cadre d'un film son comportement ne choque pas car il paraît logique, on n'a pas besoin de la voir se marrer ni même faire un mot croisé paisiblement tout en coulant un bronze, parce que ça ne servirait pas l'histoire. La simplification narrative dans le genre porno est similaire, il n'est pas nécessaire de voir la femme dans toute sa complexité dans un porno, pas plus que dans n'importe quel autre film.


En ce qui concerne les conditions de tournage, c'est forcément plus compliqués d'en parler. Beaucoup d'actrices disent que c'est un milieu horribles, les féministes en rajoutent une couche (sans forcément s'être documentées). Mais l'on trouve aussi quelques actrices déclarer qu'elles sont heureuses dans le milieu du porno. Forcément, il y a des mauvais côtés, comme dans tout boulot : ainsi, se faire ramoner la cheminée par un gros black toute l'après-midi, je veux bien croire que ce soit inconfortable et que cela gâche un peu le reste de la semaine. Mais à côté de ça, beaucoup de femmes et d'hommes font du porno parce qu'ils aiment le sexe. Ce n'est pas que une question d'argent. Et quand bien même l'argent reste important, cela ne rend pas le métier plus honteux : qui accepterait de travailler gratuitement ? Et je ne pense pas que ces femmes seraient mieux vues si elles n'étaient pas payées... Parce que ça aussi c'est terrible, il ne faut pas oublier le regard de la société sur les gens travaillant dans ce cinéma : les gens de ce milieu sont souvent moqués, considérés comme des attardés, et rares sont les employeurs capables d'embaucher des 'rescapé(e)s' ou alors c'est pour mieux mettre en valeur leur acte de générosité.


En tous cas, quand je lis les interviews de mes pornstars préférées, j'ai l'impression qu'elles sont heureuses. Mais peut-être que ce n'est que dans le monde des BBW ? Et je pense aussi que le machisme dont on parle souvent est également un peu exagéré : de plus en plus de femmes réalisent des pornos ! Et les films sont identiques. Les acteurs et actrices sont les mêmes. Je pense donc qu'il y a un réel plaisir de la femme à participer à ces films.


Emma Bailey, une de mes actrices préférées a quitté l monde du porno après une courte carrière. Non pas pour le côté sordide de la chose. Juste parce qu'elle s'ennuyait. Elle trouvait le porno ennuyant. 'Boring' ! Un tournage ennuyant, des scènes répétitives... je ne pense pas que les femmes martyrisées telles que dépeintes uniformément par les médias utiliseraient un tel mot. Et comme l'actrice n'a effectivement plus refait de porno (aux dernières nouvelles elle faisait du volontariat dans un truc social), je ne vois pas ce qu'elle risquerait à médire sur son ancien métier.


De même, de nos jours, les actrices ont des tas de solutions pour ne pas faire que du porno tout en vivant de leurs charmes. En effet, il est courant qu'une actrice partage sa semaine en plusieurs activités : vidéos solos (masturbation, feeding, ou encore cette pratique qui consiste à chier devant une caméra sans rien faire de sexuel), webcams, photos payantes, strip-teases, escort-girls : le monde du sexe regorge d'activité différentes auxquelles les dames s'adonnent. Eliza Allure a par exemple expliqué dans une interview qu'elle ne fait plus qu'une vidéo porno par semaine voir toutes les deux semaines, le reste de son temps, elle gère son site (photo et vidéos) qui lui rapportent plus d'argent. Elle continue le porno pour l'argent, mais aussi pour le sexe et sans doute pour le côté social (forcément, rester toute une journée devant sa cam, ça doit être un peu étouffant).


N'oublions pas que les femmes peuvent également plus facilement négocier leur contrat une fois qu'elles ont prouvé leur sérieux (et à en lire cette BD, il est courant d'avoir des acteurs pas respectueux des horaires, qui font faux bond au réal ou qui refusent en dernière minute de faire telle ou telle scène) simplement parce que les mecs sont plus facilement remplaçables (ça veut pas dire qu'ils font bien le boulot, apparemment, beaucoup de mecs pensent pouvoir faire ça mais se rendent vite compte du contraire), puisque c'est le femme que l'on regardera en premier.


Je ne nie pas qu'il puisse se passer des choses très malsaines, je suis bien conscient que ces femmes issues des pays de l'Est qui se font exploitées par des petites boîtes participent d'une réalité bien réelle et sordide. Mais ça m'ennuie simplement de toujours lire les mêmes choses négatives sur le porno. Certes, je ne sais pas tout, je cite peut-être même des articles mensongers sans le savoir, mais je pense tout de même que ce monde n'est pas aussi glauque qu'on veut bien nous le faire croire.


D'ailleurs je me permets de partager un lien vers une vidéo porno (donc âmes sensibles s'abstenir) en 'spoiler' ci-bas : difficile de voir dans cette vidéo un aspect réellement sordide... trouvez-vous vraiment que cette actrice est malheureuse ? pourtant ça n'a pas l'air d'être une grosse prod'. L'on constate également que c'est une femme qui réalise... et tout le monde a l'air de se marrer. Je précise aussi que Karla Lane est une 'vétéran', qu'elle a de nombreuses années, de nombreuses vidéos et de nombreuses récompenses derrière elle et je peux donc comprendre que toutes les actrices n'ont pas la chance de vivre un tournage aussi 'familial' (semblerait que ce soit dans les pays de l'est que ça se passe l plus mal de ce que j'ai pu lire auparavant et ça semblerait se confirmer avec cette BD... mais même là-bas je suis sûr qu'il y a de bonnes prod' aussi et surtout il ne faut pas généraliser, c'est comme pour n'importe quel métier, ce n'est pas parce que ça se passe mal dans une entreprise que c'est comme ça partout).


https://www.vporn.com/fisting/karla-lane-gangbang/1978242/


Voilà, je pense, que je n'ai rien à rajouter si ce n'est que j'aimerais avoir l'occasion, un jour de rencontrer et parler avec des actrices, voire d'autres employées du monde du sexe. Si cela se produit, je ne manquerai pas d'en faire part sur ce site et pourquoi pas au travers d'une BD.

Fatpooper
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le 16 nov. 2017

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