Jusqu'à présent, je n'avais jamais tout à fait accroché aux lectures du duo Brubaker/Philips. Elles ont pu être tantôt agréables (Pulp) tantôt plutôt cool (Un été criminel). Mais là, on est sur autre chose, là on est sur du très lourd !
A travers ce gros et joli pavé de 400 pages, Ed Brubaker et son acolyte préféré nous emmènent dans le Hollywood d'après-guerre (fin 40's). L'époque de Clark Gable (seul vrai acteur faisant un mini passage dans le livre), de Cary Grant, Audrey Hepburn ou autres James Stewart. L'époque aussi du maccarthysme et de la chasse aux sorcières. Et enfin, une drôle d'époque pour les femmes du milieu (et d'autres aussi…) pour qui les choses n'étaient pas rose tous les jours…
On rentre dans le bain dès l'introduction, avec Brubaker nous racontant son oncle, un scénariste très réputé durant la golden area d'Hollywood. On y apprend qu'à cette époque, il y avait la liste des 10 d'Hollywood: 10 personnalités du cinéma blacklistées car accusées de pencher côté bolchevico-gaucho. Encore une fois, drôle d'époque, je ne comprendrai vraiment jamais le discours du "c'était mieux avant" 😁
En tout cas, voir Brubaker raconter comment son oncle et tante se retrouvent d'une certaine façon mêlés à tout ça, m'a immédiatement rappelé Jason Aaron qui fait la même chose (mais avec son cousin) à la fin de The Other Side. Deux histoires de famille qui ont inspiré les auteurs, pour deux réussites littéraires.
Car oui, The Fade Out (titre VO) est une franche réussite. On se retrouve dès les premières pages happé par ce monde clinquant, flamboyant mais aussi nauséabond. On suit rapidement une multitude de personnages mais c'est fluide et toutes ces personnes croisées ou rencontrées par le protagoniste (un scénariste impliqué dans la chasse aux sorcière tiens tiens) profitent toutes (ou quasi) d'un super caracter design.
Et que dire de l'intrigue ? Quand on est fan comme moi de polar noir, c'est un vrai régal. Rien de trop téléphoné ni de trop conventionnel. Alors, ca reste tout de même assez classique dans l'approche, mais la profondeur des personnages et de l'intrigue nous plonge dans un monde dont on ne ressortira que quelques minutes après avoir tourné les dernières pages.
Et c'est alors, en fin de lecture, que j'ai tout de suite pensé à l'excellent film de Robert Altman sur les vices d'Hollywood avec le génial Tim Robbins en tête d'affiche, The Player. Si l'occasion s'en fait, ne surtout pas se priver de le regarder.
Pour finir un petit extrait que j'ai bien aimé, où le narrateur omniscient décrit l'état d'esprit ponctuel de Charlie, le protagoniste :
Charlie avait un faible pour ces jours-là… les premiers jours. Les jours où on se laisse croire aux mensonges… où on se dit que quelqu'un vous a vu comme vous êtes… a tout compris de vous… de votre âme… et que c'est ce que vous désirez. Voilà le plus doux des mensonges. Votre propre supercherie
Prochaine lecture du duo: les Sleeper ou les Kill or Be Killed