Eloge de la lenteur
Découvrir un nouveau Taniguchi, c’est un peu comme prendre place à la table d’un grand chef, on sait que le repas sera réussi, mais l’on attend avec impatience de découvrir les saveurs et les...
le 8 nov. 2012
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Découvrir un nouveau Taniguchi, c’est un peu comme prendre place à la table d’un grand chef, on sait que le repas sera réussi, mais l’on attend avec impatience de découvrir les saveurs et les subtilités gastronomiques que le maître nous aura concoctées, l’envie d’être surpris chevillée au corps. Certes, on connaît les thèmes de prédilection de cet immense mangaka et sa capacité à créer de l’émotion et des personnages d’une rare profondeur, il n’empêche qu’à chaque histoire on plonge avec délice dans l’univers de Taniguchi et l’on en redemande ; tant pis pour ceux qui reprochent à l’auteur japonais de ne pas suffisamment se renouveler. Depuis “Quartier lointain” et “Le journal de mon père”, on sait que Taniguchi porte souvent un regard empreint de nostalgie sur le passé, cette fois le bonhomme pousse la logique un cran plus loin, du côté du Japon de la fin du XVIIIème siècle, alors que le pays commence tout juste à s’ouvrir aux influences de l’Occident. On y suit le parcours d’un maître géographe, inspiré d’un certain Inô Tadataka (cartographe connu pour avoir réalisé la première carte du Japon), qui passe ses journées à arpenter Edo (l’ancienne Tokyo), dans un état de rêverie quasi permanent. Au fil de ses pérégrinations, le lecteur découvre la vie quotidienne de l’époque à travers une multitude de saynètes, tantôt empreintes de poésie tantôt d’une futilité déconcertante, qui forment un tout parfaitement cohérent.
La lenteur de cette composition alliée à la beauté plastique des planches en noir et blanc est une expérience quasiment philosophique qui, à défaut d’être intense dans son rythme, révèle une certaine profondeur. Taniguchi nous invite à la contemplation d’un Japon disparu, idéalisé dans une certaine mesure, mais qui a le mérite de prendre son temps et de nous faire rêver. Cette ode à l’épicurisme séduit par son optimisme, sa simplicité, son sens du détail et son immense curiosité, on y sent comme toujours dans le travail de Taniguchi une profonde nostalgie et la pointe d’un éternel regret. Furari (qui signifie approximativement “au hasard” ou “au gré du vent”) se déguste donc lentement, par petit bout et n’a pas d’intérêt à être lu d’une traite. Prenez votre temps pour en parcourir les magnifiques planches, pour vous attarder sur un détail ou vous laisser subjuguer par la beauté d’une scène. Une fois le livre fermé, il y a des chances que vous vous laissiez porter encore longtemps par les pas d’Inô Tadataka.
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le 8 nov. 2012
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