Gogo Monster
7.8
Gogo Monster

Manga de Taiyō Matsumoto (2000)

Il n'y a vraiment aucun chat dans ce manga? (une question que je me pose aussi)

Nos deux jeunes élèves marchent, l'un joue un morceau d'harmonica, l'autre semble sentir une présence derrière lui.
A leurs pieds une petite pousse végétale, dans leur dos la pousse grandit à vue d’œil pour devenir un arbre gigantesque accueillant des monstres difformes aux couleurs éclatantes et improbables.
Je sors le bouquin de ce boitier étrange et, plus gros mystère encore, la première planche commence sur la couverture et continuera sur la verso de cette même couverture pour finir quelques pages plus tard, le premier chapitre ne commencera qu'à la page 8...
Étrange démarrage pour un récit qui gardera cet adjectif jusqu'à la dernière page et plus encore.


Aux antipodes de toutes ces couleurs et formes diverses, Gogo Monster sera marqué d'un noir intense et profond, sans aucun doute le plus beau noir et blanc que j'ai pu voir jusqu'ici dans un manga.


Au delà de toutes ces salles, ces couloirs sinueux et étriqués, ces élèves qui discutent de toute et de rien, parfois de sujets adultes, on a cette impression de collège en perpétuel mouvement qui fait un bien fou. C'est rare de voir autant de vie sur du papier, parce que Matsumoto sait éclater sa narration, y foutre autant d'angles que de couloirs ou d'escaliers, il maîtrise les ellipses à la perfection, surtout quand il s'agit de raconter une année entière en un peu plus de 450 pages (et ça se lit hyper vite). La narration est magnifique...
Le collège revête, à ce titre, la même énergie que la ville de Katagi Choya dans Le samouraï Bambou, avec tout son folklore, ses rues où les rumeurs vont bon train, où les légendes urbaines du soir effrayent les villageois et se confondent avec la réalité.
Ici l'établissement prend vie sous nos yeux, des rumeurs circulent entre les élèves (parfois malsaines), certains ont vu des ombres menaçantes en allant aux toilettes, pourquoi ces lapins? pourquoi ce chien? cet avion qui semble frôler l'établissement à chaque passage, le mystère autour du 4ème étage sera t-il résolu ?


Je disais que je trouvais cette histoire angoissante, contre toute attente on ne verra pas une seule fois les monstres de la couverture qui logent à ce fameux étage de l'école. On est comme placé du point de vue Makoto qui ne croit pas entièrement aux visions de son meilleur copain, on en doutera nous aussi tout au long, on fouillera même chaque page à la recherche d’éventuels indices, tout ce qu'on verra (à priori, je suis peut-être passé à coté de certains détails) sera de silhouettes étranges au milieu des arbres ou dans les gouttes d'eaux, les professeurs auront même des réactions étranges, mais là aussi seul Yuki en sera témoin.
Parfois j'avais l'impression que Gogo Monster parlait de schizophrénie...


Personnellement ce qui m'a surtout angoissé, c'est cette espèce de pression sociale qui enveloppe les élèves, je serai incapable de trouver d'exemples concrets, j'ai beau essayer de chercher, tout ce que je trouve ce sont ces proverbes et règles dans pratiquement toutes les salles et couloirs... quelque chose m'a vraiment noué l'estomac quand j'étais à fond dans la lecture, bizarre là aussi...


La fin est libératrice, on ne comprend pas tout, le noir est d'autant plus présent et laisse le bon soin aux spectateurs d'imaginer ce qui peut entourer Yuki, un rayon de lumière semble vouloir s'extirper du néant, une musique retentit, "la lumière est pleine de sang", comme les tranches rouge vif des pages du livre (sur la version d'origine ou américaine*), l'histoire commence hors du livre, et si, dès le livre ouvert, on avait sauver en partie Yuki ? Makoto aura fait le reste.


Deux magnifiques dialogues caractérisent Yuki et Makoto, le premier demande quelle peut bien être la direction de cet avion qui passe chaque jour au dessus de leur tête, quelques semaines plus tard, son copain lui répondra que lui se demande d'où l'avion peut bien partir...
Je n'ai pas l'habitude d'utiliser ce mot, mais Gogo monster est sans aucun doute un chef d'oeuvre dans l'univers du manga, une oeuvre ô combien atypique, inimitable, indescriptible (c'était quand même dur d'écrire un avis...) au traitement singulier qui pourra en rebuter plus d'un, mais qui révèle toute son incroyable beauté même le bouquin refermé et replacé dans son boitier...


*A choisir, il vaut mieux privilégier la version américaine, d'une part moins chère (plus de 60 euros pour de l'occasion pour la FR non merci)..., l'édition plus jolie et cohérente avec l'esprit de l'auteur (la tranche rouge est complètement absente chez nous) .
Et notre édition possède des pages très fines qui laisse apparaître le verso, pour un manga qui joue avec le noir c'est quand même dommage.
Pas besoin d'être bilingue, c'est de l'anglais très basique.

HuangFeihong
10
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Créée

le 24 nov. 2018

Critique lue 835 fois

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HuangFeihong

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