Lorsque l'on voit la couverture, on est intrigué. On s'attend à une BD fantastique. Triste, un peu effrayante, mais une BD fantastique. En fin de compte, on y est assez loin : Grand silence, c'est un conte pour adultes tout en métaphores sur un sujet grave, et important : les violences sexuelles faites aux enfants.
Le dessin est doux, plein de couleurs, mais finalement vient appuyer le propos et la narration. On veut montrer l'innocence de ces enfants, et sans doute la "naïveté" volontaire des adultes qui ne veulent rien voir. Les couleurs servent la narration en métaphores du récit, avec les petits monstres dont les enfants ne peuvent se débarrasser ("Honte", et "Haine"...), l'usine qui enferme les cris des enfants qu'on ne veut pas écouter, puis les couleurs dont se teintent les victimes, les coupables, et les victimes à leur tour coupable.
Le conte, qui traite de ce sujet très dur, manque parfois de subtilité, mais globalement, c'est un pari réussi. Les métaphores fonctionnent, et le message est clair : il faut écouter et croire les victimes, qui sont beaucoup plus nombreuses qu'on ne veut bien le croire, et il faut les prendre en charge. Il faut, plus largement, prendre en charge cet immense problème de société, pour que plus jamais les cris des enfants ne soient enfermés, pour que plus jamais ils n'aient à être accompagnés de leurs monstres de Honte et de Haine, pour que plus jamais ils n'aient à subir ça.