Quand j’étais en pleine crise d’adolescence, un copain m’avait passé le début des aventures d’Onizuka en animé, j’avais trouvé ça très drôle et m’avais donné l’espoir de rencontrer un professeur comme lui dans mon cursus (la naïveté de la jeunesse…). Deux cycles scolaires plus tard, je me décide de lire l’intégralité du manga.
Petit (on dirait que je suis octogénaire quand j’écris ça) on ne voit pas les choses de la même manière (captain obvious est dans la place!), particulièrement quand on lit une oeuvre sociale. Parce que oui, Great Teacher Onizuka derrière des airs de comédies douteuses est un manga social.
Résumons un peu le manga de Fujisawa: on suit le rêve d’un jeune idi… homme de 22 ans ayant été un membre de gang de renom; ce bonhomme, un jeune décoloré excellant dans les sports rêve de devenir professeur, mais pas n’importe lequel, le meilleur du japon. Seulement, son caractère quelque peu original ne correspond pas au système éducatif. Il trouve néanmoins un emploi dans un collège privé, ce qui va lui permettre de réaliser son rêve et son fantasme (ah oui, Onizuka est encore puceau et c’est un sacré pervers).
Bon, derrière un résumé loufoque, l’auteur et ses assistants vont bien plus loin que mettre un professeur dans des situations inexplicables auxquelles il trouve des solutions encore plus saugrenues (mais y’en a aussi, vous inquiétez pas). Ils nous peignent un Japon en difficulté, notamment au travers d’une jeunesse ayant perdue espoir en leur système éducatif.
On suit des enfants de 14 ans sécher les cours pour aller jouer aux jeux-vidéos, cracher sur les professeurs, maltraiter leurs camarades, etc. On les accompagne dans leurs quotidiens avec leurs soucis scolaires, avec leurs amis, avec leurs parents -qu’ils soient riches ou pauvres, divorcés ou mariés. Oui, ces enfants ont perdu la foi en l’école, perdu foi en leurs professeurs. Et débarque de nulle part, un professeur excentrique qui change leur routine et la rend plus amusante en dépit de leurs problèmes. Cela donne des situations cocasses mais avec un fond: un professeur utopique prêt à donner sa vie pour rendre un de ses élève heureux ou lui redonner confiance au système éducatif.
A côté de ce rapport prof/élèves, GTO cache une satire de l’éducation japonaise, en effet, une bonne grosse partie de l’action se déroule dans l’établissement. On rigole de la Cresta du sous-directeur se faisant démolir à chaque fois qu’elle sort du garage, on rigole de la verrue du professeur d’EPS et de la sale tronche de la professeur de sciences pourtant, au travers de ses stéréotypes, l’auteur dépeint l’éducation avec des enseignants se mettant des bâtons dans les roues, n’acceptant pas le changement. On salue particulièrement la profondeur donnée à certains personnages clés, notamment au sous-directeur qui a des problèmes familiaux et monétaires, ce qui le rend un peu moins détestable mais surtout plus compréhensible dans ses actions et dans sa haine latente.
Sans vouloir trop en dire, sur la fin du manga on trouve également une dystopie d'un futur système éducatif et l’auteur se permet de critiquer l’apport de la technologie à l’éducation.
Pour parfaire ce pavé ne disant pas grand chose, l’auteur nous embarque dans un Japon avec ses travers qu’il cache derrière une multitude de gags. On rigole d’un système éducatif bourré de défauts, mais la pilule passe presque inaperçu tant on se délecte des facéties du décoloré. A lire à l’adolescence et à relire aux prémices de l’âge adulte. A lire lorsqu’on est dans le système scolaire et à relire une fois sorti, histoire d’avoir un peu de recul.