C'était quelque chose que personne n'avait réclamé, mais qui a pourtant fait son apparition en 2016: Les Légendaires Parodia, une série spin-off tournant en dérision l'univers crée par le Pamplemousse. Celle-ci ne répondait qu'à l'unique attente de Sobral, de retrouver de la légèreté dans une saga devenue nettement plus sombre. Et dans cette critique, je vais donner mon opinion sur cette série dans sa globalité.
On retrouve le concept très répandu d'un gag par page. Il ne faut donc pas s'attendre à trouver une histoire là-dedans. Il ne faut même pas s'attendre à découvrir un univers cohérent. Les parodies ne se relient pas vraiment entre elles, toutes les petites histoires sont à considérer comme du stand-alone. Un coup, cela peut se passer à Alysia avec les événements que l'on connaît, soit cela peut totalement réinventer ce que l'on a connu. Au moins, comme ça, on est assurés d'avoir des blagues variées. Mais justement, pour savoir ce que valent ces histoires, il faut savoir ce que vaut l'humour, puisque cette BD se base entièrement là-dessus.
Alors, il ne faut pas s'attendre à de la grande comédie, mais je trouve cette série tout de même bien sympathique. Je n'ai d'ailleurs pas lâché beaucoup de rires à la lecture du premier tome, même si le niveau s'améliore dans les suivants. De manière globale, je ne peux pas dire que l'humour soit révolutionnaire. C'est souvent assez gamin. À certains moments, la chute est prévisible. À d'autres moments, le gag commence à partir sur une idée sympa mais propose une chute plutôt décevante. Pour autant, je ne trouve pas l'aspect comique raté. Le résultat premier, qui est de divertir, fait toujours mouche sur moi. Parodia trouve parfois de bonnes manières de parodier nos héros, parfois en les rattachant à des univers préexistants. Si la série originale place régulièrement des clins d'oeil à d'autres oeuvres, avec celle-ci on a des références à toutes les cases (très souvent du Disney, pour mon grand plaisir). C'est très souvent gratuit, ça n'a souvent pas d'autre utilité que de pousser les lecteurs à scruter tous les coins d'une case, mais cela reste inoffensif.
Je vais dès maintenant aborder les personnages. Mais contrairement à d'habitude, je ne vois pas d'intérêt à parler des Légendaires eux-mêmes. Car ils ont beau apparaître à toutes les pages... d'une certaine manière, ce ne sont pas des personnages récurrents. Les petites histoires d'une pages étant du stand-alone, le Danaël de telle page n'est pas le Danaël de telle autre page. Ces BD regroupent des centaines de parodies de nos héros, il n'y a donc pas beaucoup de matière à les analyser. Cependant, ce spin-off a bien des personnages sur lesquels il se centre constamment: Maître Pamplemousse et ses associées. Parce que oui, Patrick Sobral se met lui-même en scène dans ces BD. Et il n'est pas seul, plusieurs jeunes filles, qui existent tout autant dans la réalité, l'accompagnent dans ses histoires.
Pour commencer on a, comme je l'ai dit, Maître Pamplemousse. C'est une représentation parodique de l'auteur de la saga. Il est représenté comme un chef tyrannique, qui fait souffrir ses employées (nos autres personnages principaux, dont nous allons parler après), ainsi que ses héros. Visuellement, notre protagoniste a l'apparence d'un petit diable, avec la couleur rouge, les crocs, les cornes et la queue qui vont avec. On touche tout de suite un point que j'aime beaucoup: Patrick Sobral sait faire preuve d'autodérision. Il se ridiculise sans cesse en se représentant comme un patron démoniaque, que personne ne peut supporter. Dans ces BD, Maître Pamplemousse est prétentieux, sadique, méchant et souvent assez stupide. Ses employées le prennent pour un malade et sont souvent désespérées de son comportement. Il en va de même pour les Légendaires, qui en veulent au Pamplemousse de les avoir tant fait souffrir durant la saga principale. L'autodérision étant une qualité à laquelle je suis plutôt sensible, j'apprécie de voir l'auteur se moquer autant de lui-même et s'inventer autant de défauts. Après, il faut être un énorme fan pour comprendre toutes les blagues concernant ce personnage, c'est un point important que j'aborderai plus tard.
Le deuxième personnage le plus important, est Jessica Jung, qui se fait appeler ici Lady Morigane. D'un point de vue extradiégétique, il s'agit de l'illustratrice et de la co-scénariste de Parodia. Au début, on suit surtout l'histoire à travers ses yeux. En effet, on peut la voir rejoindre la troupe du Pamplemousse, durant l'introduction du premier tome. Lady Morigane n'a absolument pas le même tempérament que son patron. Elle se représente comme comme une jeune guerrière, gentille et mignonne. Mais elle ne s'idéalise pas, puisqu'à l'instar des autres protagonistes, son personnage se fait complètement victimiser par le Maître. A sa manière, elle est toute aussi agréable à suivre. Elle est choupi et certaines de ses remarques sont vraiment amusantes.
Le troisième personnage a avoir su rester tout du long, c'est Kitou. Si on ne lit pas les BD (oui, oui, je vais parler de ce problème, paniquez pas), cette héroïne est particulièrement obscure. Elle est présentée comme "la gardienne du Livre d'Or", description qui peut s'avérer très vague pour les simples amateurs. Dans la vraie vie, Kitou est la meilleure amie de Patrick Sobral. Et c'est elle qui, tous les mercredis, prend le temps de répondre aux questions des fans sur le site officiel. Le Livre d'Or étant très populaire et ayant un rôle absolument pas négligeable dans le succès de la série, Kitou se devait également de tenir un rôle. Sa personnalité est très différente de celle de Lady Morigane, dans Parodia. Kitou est très froide, très sèche, très blasée. Elle ne prend absolument pas au sérieux Maître Pamplemousse, elle le juge avec beaucoup de condescendance. Là aussi, je trouve le personnage gentiment fun. Kitou a bien sa propre personnalité et permet une dynamique particulière avec les autres personnages.
Et là, on aborde le point sensible et gênant: Nadou. Les fans n'ont pas besoin qu'on la présente, il s'agit de l'illustratrice du spin-off Les Légendaires Origines. Au départ, elle devait être une employée récurrente. Lorsque Lady Morigane rejoint le groupe, Nadou est présentée comme une héroïne ayant autant d'importance que Kitou. Pour parler de la personnalité qu'on lui a donné, sa présence était sympathique. Comme reproche, je dirais que Nadou n'a jamais eu une personnalité aussi forte que ses compères. Par son tempérament mignonnet, elle se comportait un peu trop comme une Lady Morigane bis. À la seule différence qu'elle était plus timide, possédait moins de fougue. Ce qui n'empêche pas qu'elle n'a jamais été une présence gênante. Elle complétait la bande d'une façon tout à fait acceptable. Mais à partir du troisième tome, Nadou disparaît. Elle n'est plus là, n'est plus aux ordre du Pamplemousse. Elle n'est plus, ne serait-ce, que mentionnée. D'un point de vue diégétique, aucune raison n'est donnée quant à cette disparition. Mais si on s'intéresse à ce qu'il se passe en coulisse, tout fan sait ce qui est arrivé (au moins, pour ce qui nous a été communiqué). Après que la vraie Nadou se soit souvent montré insultante envers Patrick Sobral, et que de nombreuses mésententes soient nées entre eux, leur relation est complètement partie en vrille. Ce qui a conduit Nadou à ne plus faire partie de la "dream team". Il s'agit probablement du point le plus dérangeant de ce spin-off. Je reconnais qu'il aurait sûrement été hypocrite que le Pamplemousse continue de la mettre en scène, alors qu'il ne peut plus la sentir. J'admets également qu'une excuse bidon donnée dans l'histoire pour la faire partir aurait été insultant envers Nadou. Mais cela me fait quand même de la peine de la voir être ainsi évincée de cette saga. Les Légendaires ne devraient pas subir les problèmes de leurs auteurs.
Heureusement, en guise de réconfort, nous avons une nouvelle héroïne qui fait son apparition à la fin du troisième tome: Orpheelin. Cette nouvelle venue n'est autre que l'illustratrice du spin-off Les Chroniques de Darkhell (bien que les aventures du sorcier noir ne soient pas encore sorties, au moment où Orpheelin fait son apparition dans Parodia). Pour le coup, je n'ai pas de problème avec sa personnalité. Son tempérament est très singulier et apporte une vraie nouveauté au sein du groupe. Notre dessinatrice est une combattante ninja, un peu psychopathe sur les bords. À l'instar du Pamplemousse, elle peut sembler un peu sadique, elle paraît bien adhérer aux délires fumeux de son patron. Mais en même temps, elle a une vraie attache pour ses collègues, elle a donc bien une faculté de sentiments. Comparée à Kitou et Lady Morigane, Orpheelin prend beaucoup plus son pied dans son boulot. Elle a donc vraiment su apporter du changement dans la dynamique du groupe.
Il y a cependant un problème assez important avec Parodia: cette série se destine beaucoup trop aux gros fanboys. Que cette BD ne s'adresse pas aux néophytes, on peut s'en douter. C'est la parodie d'une série, on peut comprendre qu'il faille connaître un minimum la saga pour être sensible aux blagues. L'ennui, c'est que même pour une personne qui connaîtrait les bases mais sans plus, Parodia resterait à déconseiller. Car déjà, à plusieurs reprises, la BD spoile des événements importants, que seuls les lecteurs bien avancés peuvent connaître.
On a même un gag qui nous explicite que Danaël meurt dans le tome 10, on peut pas faire plus gros spoiler.
On se fait notamment beaucoup divulgâcher (j'adore ce mot) sur des événements durs, survenant après que la saga officielle ait décidé de devenir plus mature. L'humour très gamin de Parodia en devient alors beaucoup moins justifié. Sans compter les Origines, qui doivent également voir leurs intrigues devenir décalées. Mais ce n'est pas tout. Car pour comprendre tous les gags... il faut également fréquenter le site officiel! Parce que sinon impossible de comprendre pourquoi l'auteur se fait appeler "Maître Pamplemousse", impossible de comprendre qui est Kitou, impossible de comprendre pourquoi elle se bande les yeux, et impossible de comprendre ce qu'est ce Livre d'Or dont elle est la gardienne. Il est même bénéfique d'être suffisamment au courant de l'actualité de la BD pour comprendre certains gags, comme la réaction des ennemis des Légendaires, face à l'arrivée de la série animée. De manière globale, Les Légendaires devient de moins en moins accessible aux néophytes, c'est un sacré problème. Ce ne serait pas forcément grave si nos héros étaient bien plus présents dans l'inconscient collectif, malheureusement ce n'est pas le cas, aussi prolifiques soient leurs aventures.
Cependant, pour citer l'un des meilleurs points de ce spin-off parodique, on peut compter sur l'illustration de Jessica Jung. J'aime beaucoup l'identité graphique qu'elle a donné à cette BD. Le style est très cartoonesque et coloré, c'est très amusant à regarder. Et même en représentant les choses de manière très caricaturale, on ressent un certain souci du détail, rien n'est fait à la va-vite. Le style chibi permet à la saga de conserver son identité manga, tout en apportant le décalage nécessaire avec la série principale.
Donc au final, Parodia n'est pas spécialement le meilleur de ce que nos héros ont à offrir. Ça ne révolutionne rien, ni dans cette saga ni dans l'humour, et ça témoigne même de certains problèmes dérangeants entourant les Légendaires. Mais personnellement, je n'ai aucune haine contre cette bande dessinée. Quand on aime autant Les Légendaires et Patrick Sobral que moi, ça détend bien les neurones, ça reste relativement amusant et mignon.