Depuis ses 10 ans, Esther raconte sa vie à Riad Sattouf qui la retranscrit à sa façon en anecdotes d’une page. Les années avançant, chaque tome est un petit miracle tant on redoute que la jeune fille, en grandissant, se lasse ou refuse de continuer à raconter sa vie à l’auteur. Pour le moment, nous avons droit à un cinquième tome consacré à son année de 4ème. Le tout paraît chez Allary Éditions pour une cinquantaine de pages.
Tout enseignant de collège vous le dira : l’année de 4ème, c’est… particulier. Si le troisième tome, avec les présidentielles, montraient une Esther plus réflexive, on la retrouve avec sa fraîcheur habituelle, prête à nous avouer qu’elle a un amoureux mais qu’elle l’avait caché depuis quelques mois. Ainsi, toute la force de l’ouvrage qui tient de la relation de confidence qu’instaure le personnage avec le lecteur fonctionne toujours parfaitement. Il est d’ailleurs amusant de voir qu’Esther nous parle « enfin » de son doudou à 14 ans. Sans doute qu’avant cela lui paraissait normal et que maintenant, à son âge, elle se pose des questions sur le fait de l’avoir encore. Mention spéciale à sa visite de l’exposition Riad Sattouf où un homme la prend à parti en lui demandant si, à son avis, cette fille Esther existe vraiment…
Au-delà des histoires de son âge (Esther nous avouera s’intéresser à certains garçons après avoir passé longtemps à nous dire qu’ils étaient nuls), Esther nous parle aussi des événements plus généraux. Au programme par exemple : l’incendie de Notre Dame de Paris ou les gilets jaunes. C’est l’occasion aussi de se mettre à la page sur les idoles actuelles des jeunes…
Le système d’une page par anecdote, liée à la prépublication des histoires, fonctionne toujours grâce à cette narration omniprésente (à double niveau en plus, sans compter les dialogues bien entendu). C’est Esther qui nous parle et c’est ce qui fait que cela fonctionne aussi bien. Il y a beaucoup de textes dans « Les Cahiers d’Esther ». Ils sont parfaitement soutenus par les dessins de Riad Sattouf. Son trait, simple et efficace, illustre bien l’univers de la jeune fille. Les expressions des personnages, surjouées, renforcent les textes avec brio. Les couleurs, mélange de bichromie auxquelles d’autres touches s’ajoutent, mettent en valeur le trait tout en poussant la dramaturgie. J’ai l’impression que plus les tomes avancent, plus la couleur joue un rôle important dans la narration.
« Les Cahiers d’Esther » continue sa route. Ceux qui n’aimaient pas ne seront pas plus convaincus par cet opus, les autres continueront de savourer ces anecdotes qui en disent tant sur une jeunesse d’aujourd’hui, sans la juger, mais en la prenant comme elle est.