La publication du premier tome de « Ekhö » avait redonné un peu des lettres de noblesse à Christophe Arleston. Le scénariste, qui s’était essoufflé depuis bien longtemps, avait créé un monde parallèle au nôtre, mais où l’électricité n’existait pas et où les dragons servaient de transport en commun. Aidé par le dessin virtuose d’Alessandro Barbucci, les critiques avaient été très positives (peut-être un peu excessives d’ailleurs). Maintenant que le tome 3 est de sortie, où en est cette série de fantasy si proche de notre propre univers ?
A chaque tome sa ville et son intrigue. Après New York et Paris, voilà Hollywood. Malgré tout, mieux vaut avoir lu les précédents tomes pour profiter pleinement de l’ouvrage. Mais le parallèle entre les deux univers est surtout construit autour des personnages de Fourmille et Yuri, qui sont obligés de rester groupé après avoir perturbé l’équilibre entre les deux mondes. Force est de constater qu’au troisième tome, ils sont déjà intégré au monde et rien ne semble plus les étonner. Le décalage entre notre univers et celui de fantasy est digéré. Dommage.
Un peu comme un cheveu sur la soupe, il arrive que Fourmille soit habitée par des fantômes et elle doit résoudre leurs problèmes afin de ne plus être habitée. Quand c’est le cas, sa coiffure change. Ce système est un peu étrange et semble conçu avant tout pour créer des scènes cocasses où Fourmille ne réagit plus normalement, mais comme d’autres personnes, souvent hautes en couleur.
Le principe du monde miroir permet à Arleston de s’adonner à son jeu préféré : jouer avec les références. Hélas, tout est très appuyé. Alors que dans les tomes précédents, il détournait certains lieux (le central park sauvage, la tour Eiffel comme palais…), ici on a surtout l’impression de revoir l’histoire entre Marilyn et JFK. Et au final, le fil rouge général disparaît complètement. On n’avance pas du tout sur les mystérieux Preshauns par exemple. Après trois tomes, c’est un peu inquiétant. Arleston a trouvé un bac à sable où il peut donner libre cours à ses envies, mais il manque du coup du fond pour pouvoir nous emballer pleinement. Surtout que l’aspect « fantasy » et monde parallèle est peu fourni dans ce tome, comme si tout avait déjà été épuisé.
Au niveau du dessin, Barbucci fait des merveilles. On sent un dessinateur au sommet de son art, tant dans le dessin des personnages (surtout des femmes !), des décors, du dynamisme, de la mise en scène… Bref, c’est du très lourd. Hélas, sa Marilyn (enfin, Norma Jean) ressemble beaucoup à Fourmille et les changements de coiffure ne rendent pas ça très flagrant. De même, sa propension à tout dessiner pour faire des femmes nues ou des décolletés plongeants en permanence finit par lasser. Mais force est de constater que c’est un formidable dessinateur de pin-ups.
J’ai été déçu par cet ouvrage. Malgré une belle idée de départ et un dessin de haute volée, difficile de se passionner par cet amoncellement de références sans réelle histoire, ni dans le tome, ni dans la série. Le système « un tome, une ville » semble atteindre ses limites ici. Dommage.