« Lanfeust de Troy » est la première série que je me suis offerte. Après m’être alimenté depuis ma plus tendre jeunesse dans la corne d’abondance qu’était la bibliothèque parentale, j’avais décidé de voler de mes propres ailes. C’est pour cette raison que Christophe Arleston occupe une place particulière dans mon univers de lecteur. J’ai donc été attristé lorsque je l’ai vu tenir un rythme de parution effréné privilégiant bien trop souvent la quantité sur la qualité. Ces dernières productions dans le monde de Troy en sont les meilleures preuves. Mais, il y a quelques années, un espoir est né avec la sortie du premier tome d’une nouvelle aventure. En s’associant avec le dessinateur Alessandro Barbucci, le célèbre scénariste français faisait naître « Ekhö monde miroir ». Les critiques lues ici et là à l’égard de ce nouvel opus étaient plutôt positives. N’était-ce pas l’occasion de laisser une nouvelle chance à cet auteur ?
La quatrième de couverture présente le contexte de l’histoire avec les mots suivants : « Ekhö est un monde miroir de la Terre. On y retrouve nos villes, nos pays, mais légèrement différents : l’électricité n’existe pas, les dragons remplacent les avions de ligne, les wagons du métro sont sur le dos d’étrange mille pattes… Mais les plus étonnants sont les Preshauns qui, sous leurs airs de peluches formalistes, semblent tenir les rênes de ce monde… Fourmille Gratule et Yuri Podrov se sont retrouvés projetés sur Ekhö et doivent y trouver leur place. D’autant que Fourmille se retrouve régulièrement habitée par des personnalités de morts récents… »
La lecture des deux tomes précédents m’a confirmé que « Ekhö » est une série à épisode. Chaque album peut se lire indépendamment et suit une route commune. Fourmille et Yuri sont amenés à découvrir une nouvelle ville miroir lors de chaque nouvelle aventure. Après New-York et Paris, c’est autour de Los Angeles et son célèbre Hollywood d’accueillir les pérégrinations des deux héros. Une fois sur place, un meurtre est commis, l’esprit de la victime pénètre la personnalité de Fourmille. S’ensuit l’enquête pour découvrir la vérité à propos de cette mort. La recette est classique mais possède quelques atouts potentiels si elle est habilement exécutée.
Le troisième acte s’intitule donc « Hollywood Boulevard » et offre sur sa couverture une Fourmille, alter ego de Marilyn Monroe dans sa robe blanche qui se soulève. Le concept scénaristique alimente un terreau humoristique intéressant. Ce croisement entre notre monde et une atmosphère de « fantasy » permet une caricature de notre quotidien. Cet album l’axe ici sur la thématique du cinéma et du star system. Je trouve que la mayonnaise prend moins que d’habitude. Les vannes sont prévisibles. De plus la différence entre le L.A. de Ekhö et le nôtre est vraiment trop faible pour réellement chatouiller les zygomatiques. A certains moments, j’ai oublié que je ne me trouvais pas sur Terre. Je trouve cela dommage car il s’agit du point de départ de la série. Il est mis ici sous l’éteignoir.
L’autre corde humoristique de la saga nous mène au « couple » Fourmille – Yuri. Ils ne se supportent pas mais n’ont pas le droit de s’éloigner l’un de l’autre. Leur équilibre est instable et donne lieu à des étincelles qui peuvent sourire. Là encore, les surprises sont moins présentes dans cette aventure. Les deux héros nous sont maintenant familiers. Il faut donc renouveler leur relation pour alimenter la flamme du lecteur à leur encontre. Hélas ce n’est pas le cas. Une certaine routine s’installer. Les sourires sont moins amples et moins fréquents.
Concernant l’intrigue en elle-même, là encore la réussite n’est pas pleinement au rendez-vous. J’ai eu du mal à me passionner au destin de l’actrice assassinée. La résolution se fait de manière un peu brouillonne. Je trouve qu’elle manque de structure. Je trouve dommage que le suspense n’arrive pas à s’installer pleinement. Le dénouement n’est pas un feu d’artifice. Il se contente de conclure une trame un petit peu plan-plan. J’ai regretté de lire cet ouvrage sans être très curieux de découvrir la page suivante. C’est dommage.
Pour conclure, « Hollywood Boulevard » est, à mes yeux, le moins bon cru de la série. Les dessins de Barbucci mettent toujours en valeur l’univers coloré et offrent des personnages expressifs à tout point de vue. Dommage que dans ce tome le scénario ne se mette pas à la hauteur et n’exploite pas mieux ce potentiel graphique…