Si la culture manga est implantée durablement en France depuis plus de 20 ans, il est normal qu'elle fasse des émules. Des auteurs français se confrontent de plus en plus à leurs maitres japonais et c'est bien souvent pour le meilleur. Comme dans le cas d'Horion justement.
Quand on est un amateur de mangas, on a généralement tous plus ou moins les mêmes références dès que l'on parle du genre Shonen : Dragon Ball, Naruto ou encore One Piece, des chefs-d'oeuvre intemporels qui ont traumatisés plusieurs générations de lecteurs. Mais que se passe-t-il lorsque ces lecteurs traumatisés décident de prendre la plume et les crayons pour communiquer leurs passions ? Ça donne un manga comme Horion, dont le premier volume vient de sortir aux éditions Glénat le 2 mai dernier.
Un premier tome de 224 pages qui pose habilement les bases d'une histoire que l'on espère longue et riche en péripéties et qui arrive à détourner habilement les codes en vigueur pour se les approprier et créer un univers totalement nouveau et fascinant à la fois. Ici, nous sommes emportés dans un monde empreint de magie, de guerriers hors du commun et de complots politiques en germe, en suivant le périple du jeune Koza qui n'a qu'une idée en tête : retrouver son frère qui était parti rejoindre la cité interdite de Landgrave, en compagnie de son ami le prince héritier Valyu et de leur garde du corps Palk.
Evidemment, ils vont rencontrer des personnages hauts en couleur, de puissants adversaires et percer les secrets de ce monde dont ils ne connaissent au final pas grand chose.
Partant d'un postulat somme toute classique, Horion se démarque rapidement des références qui pourraient nous venir en tête par le traitement de ses personnages et de son univers. A la croisée des J-RPG, du manga, mais aussi de l'héroic-fantasy plus anglo-saxonne, Aienkei parvient à créer un monde cohérent et complet, dont on devine de lourds secrets et qui, au final, ne ressemble à aucun autre.
Aidé en cela par une écriture fraîche, des dialogues ciselés et très drôles ainsi qu'une ambiance dark qui montre rapidement le bout de son nez et qui risque de ne pas faire de prisonniers dans la suite de l'aventure, Horion parvient sans mal à s'affranchir de tout ce qui pourrait l'alourdir.
Il faut dire aussi qu'il est aidé en cela par le trait à la fois nerveux et gracieux de l'illustratrice Enaibi, qui compose ses cases avec un dynamisme impressionnant, utilise un tramage ingénieux, multiplie les poses iconiques et offre un character-design charmant, efficace, rafraichissant tout autant que varié et passionnant.
Il va sans dire que ce premier volume, en tant que tome introductif d'une saga, atteint sans mal son objectif, propose des pistes intéressantes et se révèle très divertissant tout autant que prenant et drôle. Là où on pouvait craindre qu'une oeuvre française soit trop prisonnière de ses modèles, Horion arrive à point nommé pour nous donner tort et c'est avec un grand plaisir que l'on reconnait notre erreur.
Bref, à l'issue de ce premier volume, Horion est une très belle promesse, ainsi que la confirmation qu'une nouvelle génération d'artistes français a totalement digéré les codes du manga pour les faire siens. En résulte une oeuvre hybride et passionnante, drôle et tragique à la fois qui saura contenter les fans du genre plus que de raison. Et franchement, à 7 euros le volume, c'est pas cher payé pour un récit de cette qualité.
Christophe Foltzer - 4 mai 2018 (www.ecranlarge.com)