Ceci est l’histoire de Charles-Henri Sanson. Ou du moins, s’agit-il d’une version romancée – et très libre – de celle-ci, l’auteur indiquant d’entrée s’inspirer de personnages ayant existé, mais prendre les libertés qui l’arrangent. C’est de bonne guerre. Mais cela implique deux choses : que ce manga, au même titre que La Rose de Versailles, apporte une lecture erronée de l’Histoire – le véritable Charles-Henri travailla pendant 20 ans avec son père, tandis que le mangaka prend ici une décision bien différente pour le bien de son récit – et une vision du personnage loin d’être celle couramment véhiculée.
Certes, il s’agissait d’un bourreau, efficace, et même si son travail fût alors applaudi par les révolutionnaires (du moins ceux qui n’imaginaient pas devenir ses prochains clients), il n’en restait pas moins bourreau, d’où une réputation peu flatteuse. Mais le Sanson de Shinichi Sakamoto est un adolescent emo, dépressif, persuadé que personne ne l’aime, que le monde est injuste, et qu’il sème le malheur partout où il passe. Cela n’en fait malheureusement pas un personnage sympathique ; même si nous pouvons comprendre le poids lié à son héritage, il lui arrive régulièrement de se montrer exaspérant, le pire étant que les événements viennent lui donner raison. Ce héros ne semble né que pour souffrir.
Le trait du mangaka est très soigné, très léché, avec une utilisation de photographies ou de dessins photo-réalistes pour les décors, ce qui vient renforcer l’aspect glauque de ce qu’il raconte. Ses protagonistes apparaissent comme des éphèbes, élancés, ce qui combiné aux tendances de Charles-Henri, aurait tendance à faire passer Innocent pour un Boys Love déguisé.
Au-delà de ces parti-pris graphiques et surtout narratifs – qui me parlent peu – le premier tome renferme un défaut fatal : une fois la dernière page tournée, impossible de savoir de quoi parle ce manga. A part d’un personnage – dépressif et peu attachant – de bourreau nommé Charles-Henri Sanson. Il ne s’agit pas d’une œuvre historique en raison des incessantes libertés prises avec les faits, et aucun scénario ne ressort, outre le quotidien et l’évolution de Sanson. Autant j’ai pu donner le bénéfice du doute à 7 Shakespeares en raison d’un auteur que j’apprécie et d’une entame convaincante, même si son premier tome n’indiquait absolument pas de quoi il allait parler, autant Innocent ne bénéficie absolument pas de ces atouts ; ce que j’ai lu m’a peu emballé, et n’a strictement rien apporté qui aurait pu attiser ma curiosité, et me donner envie de continuer ma lecture.
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